lundi 18 juin 2007 par Le Patriote

Incroyable mais vrai. La Chambre judiciaire a rendu le verdict de l'affaire Poste de Côte d'Ivoire-Zéhi Sébastien, le 14 juin dernier, sans soumettre au préalable le dossier au ministère public, précisément au Parquet général. Le constat a été fait après de minutieuses investigations. La Chambre judiciaire a rejeté le recours en annulation de l'arrêt de la Cour d'appel, qui, le 02 février 2007, a réinstallé Zéhi Sébastien dans ses fonctions de Directeur général. Alors que le 14 février et le 21 mai dernier, la Cour suprême avait ordonné le sursis à l'exécution de l'arrêt de la Cour d'appel. Décision qu'avait contestée Zéhi et son conseil. Cette affaire démarrée depuis le début du mois de février part de rebondissement en rebondissement. Mais pour beaucoup d'observateurs, c'est à un véritable tango que s'adonne la justice ivoirienne. Et le récent verdict de la Chambre judiciaire a fini par nous situer sur ce qui s'est tramé le jeudi dernier au Temple de Thémis.

Le Parquet général
ignoré et indigné

Selon des indiscrétions, lors de cette audience, qui statuait sur le fond de l'affaire, Poste de Côte d'Ivoire contre Zéhi Sébastien, le président de la Chambre judiciaire, Assoma Yao, a passé la parole au ministère public représenté par M. Doueu Omer, afin qu'il se prononce sur ce dossier. M. Doueu a révélé que ce dossier n'ayant pas été communiqué au ministère public, il était incapable de se prononcer sur cette affaire. M. Adam Seka qui a rencheri, s'est alors interrogé sur la communicabilité du dossier puisqu'il n'a pas été communiqué au ministère public pour que le parquet général donne son avis. Mais contre toute attente, le président Assoma Yao a prononcé le verdict. Devant les membres de la troisième formation, à savoir Adam Séka, Sioblo Douaï (rapporteur de l'affaire), Gnango Dakoury et Ouaka Adon qui avaient en charge le dossier. Ve Boua, un autre membre de la troisième formation n'a pu siéger pour cause de maladie. Bien qu'étant président de la Chambre judiciaire, Assoma Yao n'est pas issu de la troisième formation qui a statué sur le dossier. Il dirige plutôt la première formation. La deuxième formation étant l'affaire de Tagro, la troisième formation (Adam Seka), la quatrième formation (Mme Zékré), le Pénal, est l'affaire de Wouné Bleka. Ce verdict du président Assoma Yao, n'a pas manqué d'indigner des avocats du parquet général. Nous ne comprenons pas pourquoi cette affaire a été traitée avec beaucoup de célérité par Assoma Yao. Alors qu'il y a d'autres dossiers qui, depuis une à deux années ne l'ont pas été. Ils croupissent à la Chambre judiciaire. Et il est bien curieux que Assoma Yao, même s'il est président de la Chambre judiciaire, se soit auto-saisi de cette affaire confiée à la troisième formation, alors que lui, est de la première formation. Nous n'avons pas compris son acharnement et le verdict qu'il a prononcé. Cela ne doit pas se faire puisque le parquet général n'a pas donné son avis. M. Assoma est tout juste venu pour rendre le verdict et partir , se sont indignés ces membres du parquet général qui ont requis l'anonymat. L'on s'interroge alors sur les motivations du président Assoma Yao. En effet, le parquet général estime que c'est une nécessité élémentaire de transmettre le dossier au ministère public pour qu'il donne ses conclusions avant que le verdict final ne soit prononcé par la Chambre judiciaire. La poste, c'est l'Etat de Côte d'Ivoire. Le ministère public devait avoir reçu au préalable le dossier, afin de rendre ses conclusions. Mais si cela n'a pas été fait, l'affaire doit être alors automatiquement renvoyée.

Violation de l'article 106

Chose curieuse, le président Assoma Yao n'a pas daigné renvoyer l'affaire du 14 juin dernier alors que le ministère public n'a pas donné son avis sur le dossier. C'est donc une violation de l'article 106 du code de procédure civile comme l'a souligné un procureur. A preuve, la section 4 relative aux Incidents de procédure, dans sa sous-section, les interventions du ministère public en matière civile , en son article 106 nouveau (Loi n°96-674 du 29/8/96) stipule que sont obligatoirement communicables au ministère public trois jours au moins avant l'ordonnance de clôture ou avant l'audience, suivant les distinctions prévues à l'article 47, les causes suivantes : celles dans lesquelles l'ordre public, l'Etat ou les collectivités publiques sont intéressés. Avec en prime, celles concernant le droit foncier ; celles concernant l'Etat des personnes ou la nationalité ; celles où des incapables ou des absents sont en cause ; celles concernant la récusation des magistrats, les prises à partie, les demandes en rétractation ; celles révélant que la demande résulte d'une infraction à la loi pénale ou concerne une procédure de faux ; celles pour lesquelles l'assistance judiciaire a été accordée ; celles concernant tous litiges de quelle que nature que ce soit dont l'intérêt financier est égal ou supérieur à 25 000 000 de Fcfa ; celles concernant la liquidation judiciaire ou la faillite. Cet article soutient que dans toutes les affaires communicables, le ministère public doit présenter des conclusions par écrit. Dans les sections de tribunal, les causes ci-dessus énumérées sont obligatoirement communiquées au Procureur de la République près le tribunal de première instance.

Vers la reprise de l'affaire

Face à cet impair, l'on indique déjà, du côté de la justice ivoirienne, que cette affaire, en se référant à l'article 106 du code de procédure civile, sera reprise. Car toute décision rendue au mépris des présentes dispositions est nulle et de nul effet. L'affaire est portée à nouveau sur simple requête, par la partie intéressée, devant la même juridiction qui statue autrement composé, dans le délai d'un mois, à compter du dépôt des conclusions du ministère public devant la juridiction. Lorsque la première juridiction qui a statué est une section détachée, la juridiction compétente est le tribunal de première instance dont relève la section , explique l'article 106. Selon certaines informations, le Conseil d'administration de la Poste de Côte d'Ivoire, a saisi, par son conseil, le secrétariat général de la Cour suprême pour la procédure. Mais au vu de l'article 106 de ce code de procédure, on affirme déjà, du côté du temple de Thémis que le procès sera repris. Puisque la procédure a été entachée. Des hommes du barreau ont également affirmé ne pas comprendre que la Chambre judiciaire ait rendu un verdict le 3 juin 2007 en se référant à une décision du 3 mai, alors que le 21 mai, le président de la Cour suprême Tia Koné, avait confirmé la suspension de la réinstallation de Zéhi. Pourquoi avoir attendu que le président Tia Koné rende sa décision pour que la Chambre judiciaire prenne le contre-pied de cette décision. Est-ce fait à dessein ? . C'est la question à laquelle bon nombre de personnes tentent de trouver réponse. Et les supputations vont bon train à ce sujet. L'on n'hésite pas à raconter que les relations entre Tia Koné et Assoma Yao ne seraient plus au beau fixe. Vrai ou faux ? Seul l'avenir nous situera. Mais aujourd'hui, l'on s'accorde à reconnaître que la violation de l'article 106, par le président Assoma Yao, n'est pas chose à rassurer les opérateurs économiques qui ont toujours accusé la justice ivoirienne de ne pas dire le droit. Cependant l'on est d'avis que le président Tia Koné, avant toute décision, a toujours attendu que le ministère public donne ses conclusions avant de rendre un verdict. Il l'a fait récemment avant de trancher sur la forme de l'affaire Zéhi. Ce qui n'a malheureusement pas été le cas pour le verdict sur le fond prononcé par le président de la chambre judiciaire. Toute chose qui amène des experts du barreau a affirmé que le président Tia Koné demeure le meilleur parquetier de Côte d'Ivoire et même d'Afrique de l'ouest. Qui jouit même d'une grande estime dans le monde du droit pour son respect des procédures. Il sera donc très difficile à M. Zéhi Sébastien de se réinstaller pour le moment puisque la procédure n'a pas suivi son cours normal. L'on s'achemine inexorablement vers la reprise de l'audience.

Jean Eric ADINGRA

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