vendredi 25 mai 2007 par Fraternité Matin

La Femme fatale, c'est le titre d'un livre politico-sensationnel qui défraie la chronique depuis quelques semaines en France. La femme fatale dont il est question dans ce livre est la candidate malheureuse à l'élection présidentielle française. Ségolène Royale, candidate socialiste, battue au second tour, le 6 mai dernier, par le candidat de la droite, Nicolas Sarkozy. Juste après cette défaite électorale, Ségolène Royale et son compagnon, François Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste (PS), doivent faire face à la publication dans la presse parisienne de leurs problèmes les plus intimes. Ils tentent vainement de s'opposer à la sortie du livre écrit par deux (femmes) journalistes du quotidien Le Monde, Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin. Le couple charge son avocat, Me Jean-Pierre Mignard, de déposer une plainte pour atteinte à l'intimité de leur vie privée, comme à leur honneur et à leur considération. Voilà la présentation faite par l'éditeur, Albin Michel, du livre, dont de larges extraits faisaient les choux gras de la presse, avant même sa parution, le 11 mai: Ségolène Royal a surgi dans la course à la présidentielle sans qu'on saisisse vraiment où elle puisait son ambition. Aiguillonnée par une blessure secrète, débarrassée de ses scrupules, investie d'une mission, elle a choisi de contourner le PS et François Hollande. Seuls quelques proches ont compris l'incroyable scénario qui se jouait entre le premier secrétaire et la candidate. Rares sont ceux qui ont saisi l'ampleur du défi que cette dernière, en bousculant les réflexes militants et en plaçant les éléphants hors jeu, imposait aux socialistes en même temps qu'à son couple. Ecartelée entre son parti et sa garde rapprochée, prête à bousculer tous les dogmes pour sauver ses chances, elle entraîne malgré elle son camp vers une défaite fatale, qui signe la fin du PS de François Mitterrand. Femme fatale ou femme incomprise, le livre s'étend également sur le déroulement calamiteux de la campagne de la candidate socialiste, menée quasiment à l'écart, voire en opposition à l'appareil du parti. Ce qui a fait dire à un politologue français, après la défaite du 6 mai que, en fait de femme fatale, il fallait plutôt parler de l'homme fatal. L'homme fatal ainsi désigné est le compagnon de la candidate, ci-devant premier secrétaire du parti, accusé par bon nombre d'observateurs de la vie politique française et aussi (et peut-être surtout) par de hauts responsables du PS, d'être le principal responsable de la défaite de la candidate. Lui qui avait une forte préférence, dit-on, pour Lionel Jospin, ancien Premier ministre socialiste et retraité officiel de la vie politique depuis sa déroute électorale de 2002.
Extraits: Dray est l'ami du couple depuis vingt-cinq ans. () Depuis qu'il s'est retrouvé projeté dans un conflit conjugal qui n'est pas le sien, il [Julien Dray] a compris qu'il a gagné un nouveau pouvoir. Conseiller en sentiment autant qu'en stratégie politique, il a d'abord navigué de Ségolène à François pour tenter d'arranger les choses. Maintenant, il va de François à Ségolène dans une stratégie sensiblement inverse. Il ne cesse plus, désormais, de s'étonner tout haut devant Ségolène des ambiguïtés de son compagnon. François a du mal à s'effacer ... C'est à croire qu'il veut te faire perdre...? () Hollande s'entête pourtant. Sa propre compagne est plébiscitée par les sondages, applaudie par les militants, rejointe par un nombre croissant de cadres du parti, et lui pense toujours à un candidat dont personne ne veut [ Lionel Jospin ] . Alors Julien Dray, confondant comme à son habitude tous les registres, se charge d'être plus brutal. Hollande veut gêner Ségolène ? Le député, l'ami du couple passé avec armes et bagages dans le camp Royal, s'en va expliquer discrètement aux journalistes, avec des airs de conspirateur et un ton de conseiller conjugal, que la crise est désormais ouverte entre Royal et Hollande. Ségolène tient une grenade dégoupillée à la main, assure-t-il . Elle lui a dit : Si tu vas chercher Jospin pour me faire barrage, tu ne reverras jamais tes enfants! ()?
Portrait réelle d'une femme machiavélique et d'une jalousie étrange? Ou image réductrice d'une femme libre et ambitieuse qui a bouleversé tous les préjugés et bousculé le Parti socialiste? Les avis sont partagés. Voici, au dire des auteurs du livre, ce qu'en dit l'un de ses nouveaux amis et soutiens pendant sa campagne, l'intellectuel Bernard-Henri Levy, alias BHL. Extraits: En ce début février, à l'époque où la candidate socialiste est au plus bas dans les sondages, elle dîne donc avec BHL. [...] Elle est sans fard, ne minaude pas. A minuit passé, comme tant d'autres, il est séduit. On le devine dans le récit qu'il en dresse dans le Point?, le 8 février, mais aussi dans la presse américaine, où il raconte par le menu son dinner with Ségo?. François Hollande est outré du procédé, et, évidemment, de la mise en scène galante de cette rencontre. Elle pardonne. On la comprend. Sur l'Europe, sur l'Iran, le philosophe la trouve bien plus pertinente, franchement, qu'on ne l'a écrit?. Et de conclure : Je la quitte, toujours perplexe, mais avec le sentiment qu'on a peut-être été injuste - moi le premier - avec cette femme ; et qu'elle ne ressemble guère , en tout cas, à l'image qu'elle s'est donnée. Michèle Pépé
-?La Femme fatale?, par Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin, journalistes au Monde, sortie vendredi 11 mai chez Albin-Michel

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