Agent Fifa, Alfred Obrou a plus d'une décennie d'expérience dans le métier. Avant l'ouverture du mercato en juin, il parle de la production des pros ivoiriens et évalue la valeur marchande de son poulain, Kader Abdul Kéita, le Lillois.
Comment avez-vous vu la prestation des professionnels ivoiriens en cette fin de saison, notamment les Didier Drogba, Kader Kéita, Arouna Koné et bien d'autres?
La prestation des pros ivoiriens est positive dans l'ensemble. Tous se battent bien avec Didier Drogba qui les tire par le haut. Ils ont tous commencé très fort, avant de baisser un peu, mais la majorité est remontée pour finir fort. Je suis content de mes deux poulains notamment Arouna Koné qui est champion de la Hollande et Kader Kéïta qui a aussi fait un très bon début de saison même s'il n'a pas terminé en puissance, mais pour moi c'est positif. Je suis content.
Kader Kéita est annoncé à Manchester, au Milan, à Lyon et dans bien d'autres clubs. Arouna Koné est pisté par Arsenal, Liverpool. Agent de ces deux joueurs, seul vous pouvez éclairer la lanterne des sportifs
Pour moi ce sont des rumeurs dont je ne tiens pas compte. C'est vrai, ils ont fait des saisons qui attirent ces clubs là vers eux. Mais le fait qu'un club s'intéresse à un joueur ne veut pas dire qu'il va conclure l'affaire. Donc pour l'instant tous ces clubs se sont informés sur le joueur, mais il n'y a aucune offre concrète. Même s'il y avait une offre, cela serait rendu public après la signature du contrat. Peut-être que les journalistes sont plus informés que moi. Sinon pour l'heure il n'y a rien.
Ne faites-vous pas de la rétention de l'information ?
Non, je dis seulement que je n'ai pas encore d'offre concrète. Sinon, j'ai été contacté par des clubs européens.
Lille avait fixé 22 millions d'euros pour Kader Keita comme close libératoire. Ce montant tient-il toujours ?
La close libératoire se négocie selon la forme du joueur. Le cas de Kader peut donc se négocier. Parce qu'il sera difficile tout de suite de trouver un club qui va mettre 22 millions d'euros surtout au mercato. De toutes les façons c'est toujours discutable, donc je ne suis pas inquiet. Parce que tôt ou tard, ça ce fera.
En tant qu'agent de Kader, pensez-vous vraiment qu'il vaut aujourd'hui 22 millions d'euros soient 14 milliards cfa environ ?
Je dirais oui et non. Oui, si on s'en tient à ce qu'il a démontré en début de saison et en Ligue des champions. Non, par rapport à la baisse de forme qu'il a connue à un moment donné. Mais tout dépend de l'intérêt que porte le club au joueur. Un joueur peut valoir n'importe quel prix. Après tout dépend de ce que veut l'entraîneur qui l'accueille. Il peut être le premier ou le deuxième choix d'un club. L'année dernière, Ribery était le premier choix de Lyon, Kader était le second. Tout dépend des offres du club. Kader peut valoir 22 millions d'euros si c'est Chelsea ou Real Madrid qui frappe à la porte. Il vaudra moins que ça si c'est Rennes par exemple qui a besoin de lui.
Comme vous parliez de premier choix, Kader, aujourd'hui est le premier choix de quel club?
(Rires). Comme je n'ai pas d'offre concrète, je ne vous dirai pas qui est le premier ou le deuxième. C'est vrai qu'il y a beaucoup de clubs qui se sont informés sur le joueur et qui n'ont contacté. J'ai parlé avec eux, je n'ai encore rien de concret dans le sac. Non, je ne veux pas jouer le jeu des journalistes qui avancent des chiffres et des noms de clubs. Ce sont des choses qui ne sont pas toujours vraies. Tout ce qui sort de ma bouche doit être pris au sérieux parce que je suis au c?ur de la chose. Et quand on est dans cette position on ne dit pas n'importe quoi. On dit ce qui est vrai, avec des preuves à l'appui.
Avec la place qu'occupe aujourd'hui le football en Côte d'Ivoire et en Afrique, vous en tant qu'agent de joueurs, avez-vous conscience de la tâche qui vous incombe?
Oui, nous en avons conscience. Je suis Africain et fils de pauvre. En tant que tel si un autre fils de pauvre me demande de m'occuper de sa carrière, j'avoue que c'est une très lourde responsabilité. Et il ne faut surtout pas jouer avec la vie des enfants. Parce que ces enfants-là vous confient souvent leur avenir contre l'avis de leurs parents, parce qu'ils pensent que c'est vous qui devez faire d'eux des footballeurs professionnels. L'enfant peut ne pas réussir au football, mais tu es obligé de le faire réussir dans la vie. C'est aussi cela la responsabilité d'un agent de joueurs. Beaucoup de personnes pensent qu'il faut faire des affaires, empocher des millions et c'est tout. Ou on tente de faire une affaire avec le gamin, si ça ne marche pas, on le laisse à la rue. Or il faut aller jusqu'au bout. Maintenant si le garçon te déçois c'est une autre paire de manches.
Depuis votre retour en Côte d'Ivoire, travaillez-vous désormais exclusivement avec des Africains ou avez-vous toujours des joueurs européens dans votre écurie?
Depuis mon retour en Côte d'Ivoire, j'ai décidé de ne travailler qu'avec des Africains. Travailler avec un européen est difficile parce que le talent n'est pas en Europe. L'Afrique est l'un des plus gros réservoirs du football mondial. Vous n'allez pas me demander de quitter ce réservoir dont je fais partie pour me retrouver en Europe qui un terrain compliqué. L'Europe n'a pas les talents qu'on a en Afrique. Or ce qu'on a en Afrique se trouve partout. Il faut seulement avoir les yeux pour trouver.
A un moment donné, vous avez eu des brouilles avec certains dirigeants ivoiriens. Où était le problème?
C'est l'interprétation des textes du football qui nous opposaient. J'ai trouvé ici, beaucoup de joueurs ivoiriens et même des dirigeants qui ne connaissaient pas leurs droits et leurs devoirs en matière de football. Ils entretenaient des relations de père à fils ou d'oncle à neveu avec les joueurs. A un moment donné on ne savait plus quels étaient les droits et devoirs de chacun. Quand je suis arrivé, j'ai commencé à m'appuyer sur les textes, ce qui, naturellement a bouleversé les habitudes. Ce que certains présidents n'ont pas apprécié. Mais quand ils ont compris que je n'étais pas contre leurs intérêts et que je venais même améliorer ce qu'ils avaient déjà, ils ont compris qu'il fallait faire avec moi. C'était juste des problèmes d'interprétation des textes du football.
Il se raconte que vous avez eu quelques brouilles avec Me Roger Ouégnin le Pca de l'Asec Mimosas. Qu'en est-il?
Brouille, je dirais non. Roger est l'un des dirigeants avec lequel je m'entends bien. Parce qu'il respecte les textes en tant qu'avocat. Il respecte aussi celui qui est en face de lui et qui connaît les textes et les respectent. C'est vrai à un certain moment, on ne s'est pas entendus sur certaines choses, mais ce sont des histoires entre grand frère et petit frère. Il m'a engueulé et après on est tombé d'accord.
Sur quel cas ce malentendu est-il arrivé?
J'allais dire pas sur un joueur, mais sur les textes. Quand je dois discuter avec un joueur de l'Asec, la première personne à informer c'est lui. Je ne m'occupe jamais de ce qui se dit à côté. Parce que c'est ce qu'il dit qui est important.
Comment voyez-vous le match Côte d'Ivoire-Madagascar comptant pour les éliminatoires de la CAN 2008 à Bouaké?
C'est un match que nous allons gagner, c'est la fête que la Fif organise à Bouaké que je retiens. Nous étions pour le foot à Bouaké quand la guerre a commencé, nous voulons être là pour le foot quand la guerre est finie.
Quels commentaires sur l'affaire Ufoa que vit la sous-région?
Ce qui arrive à l'Ufoa est la photocopie conforme de ce qui se passe à la Cedeao. En Afrique, on ne respecte pas les textes. On les crée nous-mêmes mais on ne les respecte pas. Si les textes disent que Jacques Anouma doit demeurer à son poste, il y reste! Si les textes prouvent le contraire, il s'en va un point c'est tout! Ce n'est pas compliqué du tout! C'est parce qu'en Afrique on préfère utiliser les moyens illégaux pour régler les problèmes qu'il y a tout ce bruit à l'Ufoa, sinon en principe il n'y a pas de problème dans cette union.
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