mercredi 23 mai 2007 par Le Nouveau Réveil

Après la partie euphorique du démantèlement des milices de l`ouest ivoirien, arrive la partie laborieuse. Le dépôt symbolique est fait, mais le processus est loin d`être terminé. Quatre jours après la fête, bien de choses se passent encore dans la région du Moyen Cavally qui n`augurent rien de bon. Les milices se regardent en chiens de faïence, les miliciens grognent. Des armes circuleraient toujours, ou tout simplement des armes sont introuvables. Avant d`être résistant, chacun était quelque part, c`est là qu`il doit retourner. Et s`il peut aller au service civique, c`est un plus. Nous sommes des volontaires, c`est-à-dire ceux-là qui ne demandent rien après un service renduSi des gens sont tombés au combat, c`est qu`il y a des blessésDans tous les cas, il n`y a personne pour les dédommager. Pas même l`Etat. Car, ils n`ont pas combattu pour l`Etat, mais pour eux-mêmes " Ces propos sont de l`adjudant Oulaï Delafosse, actuel sous-préfet central de Toulépleu, et désigné par Maho Glofiéhi comme le chef d`Etat-Major des Forces de Résistance du Grand Ouest (FRGO). Ils les a tenus dans une interview publiée hier dans les colonnes de Fraternité Matin. Au-delà de simples mots de devoir, ces propos en disent long sur le mécontentement de certains miliciens qui se plaignent d`être abandonnés après qu`ils aient donné leur poitrine pour défendre la République et surtout pour le régime Gbagbo. Au nombre de ces mécontents, figure en bonne place la milice FS-LIMA qui ne cache plus son désamour avec Maho Glofiéhi du FLGO qu`ils ne reconnaissent pas comme leur chef, encore moins comme leur porte-parole. Et comme en réplique à ce que Maho Glofiéhi a dit devant Gbagbo le samedi dernier, Koula Pouho Richard, patron des FS-LIMA, a déclaré hier dans les colonnes de l`Intelligent d`Abidjan : " C`est nous qui avons libéré respectivement Bloléquin, Toulépleu, Bin-Houyé, Zouan-Hounien jusqu`à Téapleu. Les autres factions sont des factions de bureau. Nous ne les avons pas vues sur le terrainNous n`étions pas basés seulement à Toulépleu, mais aussi à Guiglo. On ne connaissait pas encore les FRGO. C`est après la libération de l`ouest et l`accord de Marcoussis, qu`on a vu les FRGO dans les journauxMaho dit qu`il est le chef. Mais, il n`est que le chef de son groupe. Il ne commande pas tout le mondePour le moment, nous ne demandons rien. Nous n`avons pas signé de convention avec le Président de la République " Déduction, tout ce que Maho Glofiéhi dit n`engage que son groupe qui est le FLGO. Quand Banaho Gabriel, patron de l`UPRGO de Duékoué, dit dans les mêmes colonnes : " Je suis Banaho Gabriel, ancien combattant de la classe 58. Je suis le président fondateur de l`UPRGO de Duékoué. Je suis venu avec mes hommes pour accueillir le Président de la République ". Il finit de convaincre que les milices de l`ouest prêchent chacune pour sa chapelle. Même si toutes soutiennent ne rien attendre en retour de leur désarmement, on retiendra qu`elles ne cracheraient pas non plus sur l`argent qu`on pourrait leur donner. Et c`est cela le n?ud du problème. S`il y a de l`argent à recevoir, chaque milice entend recevoir sa part directement de la main des autorités. " Nous ne voulons pas d`intermédiaire. Nous n`avons pas confiance en Maho et ses hommesDélafosse dit qu`il n`y a personne pour nous dédommager. Parce que nous n`avons combattu que pour nous-mêmes. Pourquoi a-t-il accepté d`être nommé sous-préfet central et d`augmenter de grade comme récompense ? ", nous a confié hier un élément des FS-LIMA, joint depuis Guiglo. En réalité, c`est la guerre de leadership qui fait rage au sein des milices. Que ce soit du côté des FRGO ou de celui des LIMA, les ex-combattants sont convaincus que de l`argent, beaucoup d`argent a été déjà donné à ceux qui sont devant eux et que cet argent a été simplement détourné : " C`est parce que ceux qui sont devant nous ont déjà reçu suffisamment d`argent qu`ils ne nous ont pas distribué qu`ils disent aujourd`hui que nous n`attendons rien. Sinon, pourquoi les Maho, Gami, Colombo et tous les autres luttaient ferme pour que leurs différentes factions soient prises en compte par le PNDDR ? N`est-ce pas pour bénéficier des 500.000 F promis par combattant ? Ils savent bien qu`ils n`ont pas combattu pour l`ONU ", a insisté, hier aussi, un chef de bataillon des FRGO joint à Guiglo. De fait, après le départ de Gbagbo le samedi dernier, des hommes ont entrepris de distribuer aux combattants ayant effectivement été recensés avec leurs armes des sommes variant entre 15.000 et 25.000. Ce que la plupart des hommes refusent. Or, il se dit aussi que beaucoup n`ont pas encore déposé leurs armes, en attendant de voir un peu plus clair quant au désintéressement par combattant. D`ici-là, peut-on parler de désarmement des milices quand tout indique que les chefs ou déclarés comme tels ne maîtrisent plus tous leurs hommes ? D`ailleurs, en 2004, les forces de résistance de l`ouest revendiquaient au total 12500 combattants. Le samedi dernier, il a été dit (selon le journal gouvernemental) que ce sont 1027 fusils qui ont été collectés et remis aux onusiens. Où sont passés les autres ? De deux choses l`une. Soit ces fusils d`assaut sont toujours aux mains des miliciens qui échappent désormais à tout contrôle, soit ils ont pris effectivement d`autres directions telles celle du Libéria. A quelles fins ? Pour combien de temps ? Et si on courrait vers une autre crise entre miliciens de l`Ouest ? La poudrière de l`ouest est intacte et fait peur.
Eddy PEHE

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