lundi 14 mai 2007 par Le Nouveau Réveil

Du 15 au 20 mai, le cardinal Renato Raffaele Martino, président du conseil pontifical "justice et paix", président du conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement séjournera en Côte d'Ivoire. Dans l'entretien qui suit, l'Archevêque de Korhogo, Monseigneur Marie Daniel Dadiet, président de la commission nationale "justice et paix" parle de l'évènement majeur que s'apprête à vivre l'église catholique de Côte d'Ivoire. Et se prononce sur le processus de paix.

Monseigneur, les chrétiens catholiques ivoiriens s'apprêtent à vivre un évènement majeur. Pouvez-vous nous en parler ?
L'église de Côte d'Ivoire et toute la population ivoirienne vont dans peu de temps accueillir un envoyé du Saint Père Benoît XVI. En la personne du cardinal Renato Raffaele Martino qui est le président du conseil pontifical "justice et paix". Et aussi président du conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement. Il vient donc pour soutenir moralement le peuple de Côte d'Ivoire qui a souffert de cette crise socio politique qui a éclaté depuis le 19 septembre 2002. Il est donc un envoyé du Pape pour nous réconforter. Et puis à l'occasion, nous donner le message pour lequel le Saint père l'envoie en Côte d'Ivoire.

Le Saint Père qui envoie son collaborateur en Côte d'Ivoire, quel message cela traduit ?
Vous savez que Rome est le centre de la chrétienté catholique. Le Pape est avant tout le chef de l'église catholique. Et tout Pape s'intéresse aux situations et problèmes qui concernant les pays, les régions. Comme vous le savez, en Côte d4Ivoire, nous avons connu une crise. Le Pape n'est pas resté indifférent. Que ce soit le pape Jean Paul II ou aujourd'hui le Pape Benoît XVI. Le fait de nous envoyer aujourd'hui un représentant, cela veut dire que le pape soutient le peuple ivoirien qui a souffert de la crise. Il le soutient moralement et spirituellement. Nous pensons que l'arrivée du cardinal, c'est pour nous inviter à aller à la paix définitive et à la réconciliation totale.

Il a été aussi dit que le cardinal Martino vient présenter la doctrine sociale de l'église. Qu'en est-il ?
Le fait que le cardinal soit envoyé par le pape pour nous donner un message, tout cela fait partie de la doctrine sociale de l'église. Parce que la doctrine sociale de l'église est basée sur l'amour, sur la paix, sur la justice. La doctrine sociale de l'église, ce sont toutes les interventions, toutes les réflexions, toutes les exhortations qui ont été faites par les différents Papes. Et cela depuis Pape Léon XIII jusqu'à Benoît XVI, en passant par le Pape Jean Paul II, de vénéré mémoire. L'église étant dans la société, elle ne s'intéresse pas seulement à la paix spirituelle. Mais elle s'intéresse aussi à tout ce qui regarde la société et l'homme. Le cardinal que nous recevront en Côte d'Ivoire a été représentant permanent du Saint siège à l'ONU seize ans durant. Souvent, il a été envoyé par le pape dans les régions où il y avait des conflits, des guerres, où l'on parlait de conflits armés, de désarmement. Il a essayé de régler tous ces conflits. Le fait que ce soit lui qui vient en Côte d'Ivoire, je dis que ce n'est pas un hasard. C'est une providence. Parce qu'il maîtrise un peu tout ce qui touche à la vie de l'homme.

Avec la crise que vit la Côte d'Ivoire depuis 2002, peut-on dire que les chrétiens ivoiriens se sont démarqués de la doctrine sociale de l'église ?
Après que la crise eut éclaté, automatiquement les chrétiens se sont mis à la prière. Que ce soient les chrétiens catholiques ou les chrétiens des autres églises. Les croyants en Dieu ont compris que l'homme ne peut pas débloquer cette situation sans l'appui de Dieu. Donc spontanément, les gens se sont adressés à Dieu pour qu'il nous aide à sortir de la crise. Et c'est ce qui s'est passé. Il n'y a pas eu seulement que la prière. Comme le chrétien ne peut pas voir son frère en difficulté, alors tous ceux qui étaient dans les zones assiégées ont été soutenus par ceux qui étaient dans les zones non assiégées avec des dons en nature, en numéraire, des vivres. On a vu le travail colossal qu'a effectué la caritas. En allant vers les populations démunies, la caritas n'a pas fait de tri. La caritas est un organise de l'église catholique. Mais sur le terrain, elle n'a pas cherché à savoir qui est catholique et qui ne l'est pas. Spontanément la caritas a soutenu toutes les populations. Je puis donc nous affirmer que les chrétiens ont déjà pratiqué cette doctrine sociale de l'église qui consiste à s'intéresser à l'homme, à aimer l'homme dans toute son intégralité.

Quelles seront les articulations du séjour du cardinal Martino en Côte d'Ivoire ?
Le cardinal arrive le 15 mai. Il va prononcer une conférence sur la doctrine sociale de l'église. Les chrétiens catholiques doivent savoir que le contenu de la conférence, c'est que le cardinal va s'adresser aux ivoiriens qui sortent de la crise. Mais si tout n'est pas encore parfait, nous sommes en voie de connaître un dénouement total. Il vient donc nous prodiguer de sages conseils. Pour ne pas que ce que nous avons connu en 2002 se répète. Et puis aussi il va nous dire quel est le comportement que nous devons avoir désormais. Il va nous parler de paix, de justice, de réconciliation, de désarmement. Tout cela fait partie de la doctrine sociale de l'église. Pour nous dire, désormais voilà l'attitude que vous devez avoir pour éviter ce qui vous est arrivé en 2002. Si on va à la paix aujourd'hui et que demain il faut reprendre les armes, c'est comme si on n'avait rien fait. Mais le cardinal qui est un homme d'expérience saura trouver les mots justes à l'endroit des Ivoiriens pour que nous puissions profiter de sa présence. Et aller à la paix totale, définitive.

Vous êtes l'Archevêque de Korhogo. Avez-vous rencontré des difficultés dans l'exercice de votre mission durant cette crise ?
A crise en elle-même est une difficulté. Dans la mesure où on était dans la zone, il fallait vivre cette crise. Je suis un pasteur envoyé dans une région en difficulté, il n'était pas bon pour moi de quitter ce peuple. J'avais toutes les possibilités pour partir de là. Je pouvais repartir au Vatican, revenir à Abidjan. Mais j'ai dit qu'il fallait rester pour souffrir avec le peuple, le soutenir moralement. C'est ce que j'ai fait. Parlant de difficultés majeures, moi personnellement, je n'en ai pas rencontré. Mais dans la mesure où des gens ont été molestés, des maisons ont été pillées, il faut dire que le Pasteur souffre avec tous ceux qui souffrent. Mais je suis heureux de savoir que le fait de rester dans cette zone, a été pour moi un réconfort moral, de même pour les populations. Mais je n'ai pas eu de difficulté en tant que tel.

Vous avez dit que la Côte d'Ivoire est sur la voie de la paix, que préconisez-vous à l'ensemble des Ivoiriens pour faire enraciner la paix ?
Je sais qu'il n'y a pas de solution magique. Mais tout le monde sait que la situation vécue par la Côte d'Ivoire, n'a pas été facile. Tous nous en avons souffert. Qu'on soit dans la zone assiégée ou libre, tous nous avons souffert. Maintenant que les choses sont en train d'évoluer, il faut que nous puissions tous adhérer à ce processus qui veut nous conduire à la paix, à la réconciliation. C'est vrai il y a eu par moment des réticences. Je dis que c'est normal. Ce n'est pas d'emblée que les gens vont adhérer à ce qui s'est passé à Ouaga et à la nomination du premier ministre actuel. Je pense que petit à petit, on comprendra qu'il faut en finir avec cette crise. Pour que les Ivoiriens puissent se retrouver et travailler correctement. Ce que je pourrais ajouter, il faut qu'on puisse faire confiance et au président de la République et au premier ministre qui ont décidé de nous conduire à la paix et à la réconciliation. Il faut leur faire confiance, les aider avec les prières, nos conseils, notre détermination.

Vous êtes le président de la commission nationale "justice et paix" de la conférence épiscopale. Quelles autres activités prévoient votre commission ?
Je suis le président de la commission "justice et paix". Après la commission épiscopale, il y a la commission nationale. La commission "justice et paix" est un organe qui veut exhorter tous les chrétiens à mettre en pratique la doctrine sociale, à la propager. La doctrine sociale prend sa source dans l'évangile et dans les déclarations et messages des papes. Après le passage du cardinal, les comités "justice et paix" vont sillonner toute la Côte d'Ivoire. Non seulement pour implanter des comités dans les lycées et collèges, dans les entreprises, dans les paroisses, les diocèses. Mais aussi enseigner et propager la justice, la paix, la doctrine sociale de l'église. La tâche qui nous attend est immense. Je pense qu'avec la volonté des uns et des autres, nous réussirons à réaliser la mission que la conférence épiscopale de Côte d'Ivoire nous a confiée.
Interview réalisée
par Paul Koffi

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