lundi 7 mai 2007 par Le Matin d'Abidjan

La sérénité n'est plus de mise au RHDP. Les ministres issus de cette coalition s'offusquent de l'attitude jusqu'auboutiste de leurs leaders. A tout le moins, ils dénoncent en privé, la guerre menée contre le Premier ministre, et qui pourrait conduire à leur dégommage. D'un autre côté, deux membres du rassemblement rament à contre courant de la position du PDCI et du RDR.

Ils ne décolèrent pas. Les ministres issus des rangs du PDCI, RDR, MFA et UDPCI décrient la guerre de leurs leaders contre Guillaume Soro et le MPCI. Principalement, les partisans des deux ténors des partis coalisés désapprouvent en privé, l'attitude de leurs leaders. Le durcissement de ton de Bédié et ADO par leurs partisans et presse interposée, hypothèquent leur maintien au gouvernement. Des places durement acquises pour certains, grâce à une cour assidue à Soro, se trouvent menacées. Konaté Sidiki qui dénonce à tout vent "l'hypocrisie" de leurs alliés du G7, a mis le pied dans le plat lors de sa conférence de presse tenue il y a une semaine " Les Ivoiriens ont vu tous nos va-et-vient. Ils ont vu tous les efforts qui ont été faits, pour inclure tous les acteurs jusqu'à la formation du gouvernement ", fait remarquer le ministre du Tourisme et de l'artisanat. Il déplore ainsi l'ingratitude du RHDP à l'égard de Soro qui s'est battu pour préserver certains acquis des houphouëtistes. Il est de notoriété que lors des pourparlers inter-ivoiriens de Ouaga, le camp présidentiel n'a pas fait mystère de sa volonté de gérer la transition avec l'autre partie belligérante. Pour la délégation conduite par Désiré Tagro, l'équipe de Soro devrait tourner dos au schéma ''marcoussiste'' qui partageait les postes ministériels, entre les signataires de l'accord de la banlieue parisienne. Entre autres arguments, les émissaires de Laurent Gbagbo ont souligné l'importance pour les deux protagonistes d'avoir les coudées franches dans la conduite des affaires de l'Etat, jusqu'aux élections. La rébellion n'a pas voulu laisser ses alliés en marge du processus de sortie de crise. Tant bien que mal, les hommes de Bouaké ont pu préserver les intérêts du PDCI, RDR, MFA et l'UDPCI. Même si la voie tracée par l'accord de Linas Marcoussis a été écartée. Au finish, chacun des deux poids lourds s'est vu octroyer cinq portefeuilles ministériels. L'UDPCI et le MFA se contentant comme de coutume, du menu fretin. Depuis peu, la panique et le désarroi sont de mise dans le camp des 10 ''élus'' qui voient leurs fauteuils menacés. Tous désavouent sous cape l'opposition -ouverte ou non- de leurs partis contre le Premier ministre. C'est que le MPCI qui se dit outré par les incessantes attaques de la presse RHDP contre son leader, pourrait claquer la porte du G7. " Demain, on n'aura aucun mal à être en dehors du G7 si l'hypocrisie continue, s'il y a une absence réelle de volonté d'aller à la paix à travers un schéma tracé ", a vivement averti Sidiki Konaté. Conséquence immédiate de cette éventuelle rupture, le départ du gouvernement des cadres PDCI : Bakayoko Youssouf, Achi Patrick, Allah Kouadio Rémi, Téhoua Marie et Banzio Dagobert. Au RDR, ce sont Amadou Gon Coulibaly, Amon-Tanoh Marcel, Hamed Bakayoko, Cissé Bacongo Ibrahim et Jeanne Peuhmond qui seraient alors au chômage. Ces ministres sont d'autant stressés que certains parmi eux ont battu le pavé pour leur maintien. D'autres, à en croire des indiscrétions, ont dû faire allégeance à Soro, dans le dos de Bédié et ADO. On peut le dire, ils sont sur la sellette. A moins que leurs mandants fassent amende honorable et s'inscrivent sans retenue dans le nouveau cadre institutionnel édicté à Ouaga. C'est un peu ce qu'espère le porte-parole du MPCI. Pour lui, " le RHDP est concepteur et signataire (de l'accord), d'une façon ou d'une autre. " Puisque, se justifie-t-il, "avoir ses membres dans le gouvernement au nom de leurs partis, ça veut dire qu'ils adhèrent au processus dans lequel le gouvernement est engagé." Un message non codé, qui somme les houphouëtistes de choisir entre le maintien au gouvernement et filer tout doux. Ou poursuivre les critiques contre le Premier ministre et sortir de l'équipe que dirige Soro. De quoi donner le tournis aux ministres concernés. Les patrons du PDCI et du RDR, indique-t-on, comptent bien jouer les trouble-fête. Bédié et ADO estiment que le MPCI trace un boulevard pour Gbagbo, en prévision de l'élection présidentielle. Ces têtes de pont du RHDP s'estiment lésés et veulent faire payer à Soro ses arrangements avec le chef de l'Etat. Ils luttent pour leur survie politique, le prochain scrutin étant leur dernière carte. Bédié et ADO se disent trahis. Pour le premier, la rébellion a acquis sa relative légitimité grâce aux actions concertées des partis politiques qui ont rendu Soro et les siens fréquentables. Outre ce reproche, le second se mord le doigt. Le chef du RDR ayant apporté un appui logistique et financier aux insurgés, il supporte mal que ces filleuls tournent casaque. Et disent adieu à l'ambition première de la rébellion, le porter au pouvoir. En tout, une guerre de tranchées qui risque de faire mal. Les 10 ministres PDCI et RDR sont désormais en sursis. Ce n'est pas le cas des représentants de l'UDPCI et du MFA. Mabri Toikeusse qui s'est auto-désigné, ne veut pas s'inscrire dans l'intransigeance de ces deux aînés. Il protège jalousement son fauteuil, et prend ses distances vis-à-vis de Bédié et ADO. Lui, préfère placer la jeunesse de son parti pour donner le change aux frondeurs. "Le RHDP ne doit pas se tromper d'adversaire ", a ainsi osé le tout nouveau président de l'U-JDPCI, vendredi dernier dans les colonnes de ''Nord Sud''. Anaky n'est pas en reste. Il est dans le front de refus et ne s'en cache pas. L'on retient au RHDP qu'il a longtemps et ouvertement soutenu la cooptation du leader du MPCI à la Primature. Sans doute mû par un esprit de vengeance à l'encontre de Konan Banny qui l'a renvoyé sans ménagement du précédent gouvernement, Anaky s'est vite démarqué du PDCI et du RDR lors du dialogue direct. C'est sûr, ce n'est certainement pas le ministre Bamba Fatoumata (MFA) qui va faire le jeu de l'ancien chef de l'Etat et Premier ministre. C'est simple, au RHDP, tout va à vau l'eau.

Guillaume N'Guettia

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