mercredi 25 avril 2007 par Le Temps

Un courant d'idées est né au sein du PDCI. Il s'agit du PDCI Nouvelle vision. Le Temps? a rencontré son président, Narcisse Ehoussou. Dans cet entretien, il s'élève contre les pratiques anti démocratiques au sein du parti cinquantenaire et le report du congrès. Pourquoi avoir créé le PDCI -Nouvelle vision ?
La création de ce courant à l'intérieur du PDCI répond à un souci. Celui de nombre de militants, qui souhaitent voir leur parti retrouver ses marques. Soyez explicite
La situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement, remonte en décembre 1999. Quand des militaires ont pris les armes pour créer une mutinerie qui s'est transformée, au bout de 48 heures, en coup d'Etat consommé. On se rappelle qu'en 1990, cette même situation s'était présentée avec des militaires en armes, circulant dans toute la ville. Ils sont même allés jusqu'à prendre position autour de la Radio, de la Télévision et à l'aéroport. Feu le Président Félix Houphouët-Boigny a reçu ces militaires. Au terme de leur entretien, les militaires sont rentrés dans les casernes. En 1999, lorsque la même situation s'est présentée, nous n'avons pas été capables de la gérer. Le coup d'Etat est arrivé avec ses conséquences que nous vivions aujourd'hui.
Il est important qu'au niveau du PDCI, on s'asseye. Et qu'on se dise pourquoi le Président Houphouët-Boigny a été capable de le faire. Et nous, nous n'avons pas pu. Avez-vous interpellé la direction de votre parti ?
Les gens se méprennent sur le travail que nous sommes en train de faire. Ce travail ne date pas d'aujourd'hui. Après le coup d'Etat, précisément en 2000, ceux qui n'ont pas une mémoire sélective savent ce que nous autres avons fait. Des témoins sont vivants. Camille Alliali, Amoakon Edjampan, Jean Konan Banny, Alphonse Djédjé Mady savent ce que nous avons fait pour que le PDCI qui était en train de prendre l'eau de toute part puisse être stabilisé. A son retour, on a pensé qu'en bon père de famille, le président Bédié allait rassembler tout le monde, pour savoir ce qui s'est réellement passé. Pour qu'on puisse se préparer. Malheureusement, il n'en a rien été. Pourquoi ?
Nous ne le savons pas. Nous ne gérons pas le parti au quotidien. Nous avons interpellé un certain nombre de responsables, quand une occasion se présentait à nous de le faire. Même en réunion de bureau politique. Mais nous n'avons pas été écoutés. Peut-on savoir les raisons ?
Nous allons vous donner un exemple précis. Nous avons été convoqués à une réunion du bureau politique. Au cours de cette rencontre, on nous a demandé de donner mandat au président du parti, pour aller signer un accord qui devait permettre de rassembler tous les leaders des partis qui se réclamaient du Président-Houphouët. Ceux qui ont de la mémoire se rappellent. Trois problèmes fondamentaux ont été posés ce jour-là.
Premièrement, nous leur avons fait remarquer qu'avant de donner un tel mandat, il serait bon que nous prenions connaissance du document qui allait être signé. Deuxièmement, nous leur avons fait savoir que c'est bien beau d'aller rassembler ceux qui sont au dehors. Mais à notre analyse, dans la maison, il y a beaucoup de personnes qui ne sont pas contentes. D'abord, il faut rassembler toutes ces personnes-là avant de se tourner vers les autres. Troisièmement, si tel est que l'objectif des gens était de réunir tous ceux qui se réclamaient du Président Houphouët-Boigny, pourquoi n'avoir pas choisi Yamoussoukro pour sceller ce rassemblement ? Sur ces trois points, on n'a pas jugé utile de nous écouter.
Ils nous ont dit que le choix de Paris répond à un problème de sécurité d'un certain nombre de personnes. Surtout les premiers responsables des partis. Comment peut-on poser des problèmes de sécurité ? Si des militants dont on se réclame vivent dans une braise, pourquoi nos leaders ne viendraient pas dans cette braise, pour faire corps avec les militants ? Ce sont des arguments qui ont été développés mais qui ne nous ont pas convaincu. Comment peut-on donner raisonnablement mandat à quelqu'un, si on ne sait rien du contenu du document qui va être signé ?
A vous entendre, peut-on parler d'un déficit de démocratie au sein du PDCI ?
Nous sommes tentés de penser qu'il y a un problème de gouvernance au PDCI. C'est-à-dire ?
Il y a véritablement un problème de communication. Lorsque des problèmes réels sont posés, on les évacue sans autre forme de procès. Il faut que les gens comprennent que personne n'est contre le PDCI. Maurice Guikahué, l'un des responsables du PDCI soutient que les courants ne sont pas permis au sein du parti. Que répondez-vous ?
Il est responsable de ce qu'il dit. Mais, nous pensons que comme lui, nous aussi nous sommes allés à l'école. Nous le mettons au défi de nous présenter le texte du PDCI qui dit qu'en dehors des structures, qu'on considère comme officielles, JPDCI, UFPDCI, on ne peut créer d'autres organisations comme le " créa PDCI " ou le " Forum de la jeunesse ". Dans tout parti sérieux, il y a des courants de pensée qui permettent de nourrir la démocratie à l'intérieur du parti. Parce qu'un parti, ce n'est pas l'unanisme. Nous avons un combat. Celui de rassembler. Nous avons dit à Maurice Guikahué que le PDCI que le Président Houphouët nous a légué, est un PDCI de rassemblement. Le PDCI que l'actuelle direction nous donne, est un PDCI d'exclusion. En 1957 lorsque le PDCI a remporté les soixante sièges des conseillers territoriaux, le Président Houphouët-Boigny a invité les autres responsables de partis à le rejoindre pour construire la Côte d'Ivoire. Au dernier congrès du PDCI, le président du parti avait, en face de lui, des candidats. Et non des moindres. Il s'agit de Laurent Dona Fologo, Lamine Fadiga. Qu'avons-nous fait ? Fologo qui aujourd'hui, aurait pu apporter beaucoup au PDCI, au regard de son expérience, est considéré comme ne faisant plus partie du PDCI. Fologo n'est-il pas victime de son rapprochement avec le Président de la République ?
Il faut arrêter de raconter des ragots. Aujourd'hui, les gens racontent que c'est le Président Laurent Gbagbo qui me donne l'argent. Ce sont des arguments fallacieux. Lorsque des gens posent des problèmes réels, on les dévie. Nous avons créé cette structure, pour rassembler tous ceux qui sont en train de partir du PDCI. Afin de réhabiliter la maison. De le présenter sous un visage nouveau. Quelle personnalité se cache derrière votre structure ?
Ce sont des militants du PDCI qui ont la volonté de refaire l'image du PDCI. On parle du ministre Emile Constant Bombet
Nous sommes proche du ministre Bombet. Nous n'avons jamais fait mystère sur la question. Ils ont écrit dans un journal que mon père est militant du Front populaire ivoirien. Ce qui est vrai. Donc ils n'apprennent rien aux gens. Est-ce que je suis plus proche du ministre Bombet que de mon père ? Si nous ne sommes pas avec lui au FPI, pourquoi les gens n'acceptent pas que nous puissions faire quelque chose sans que forcément le ministre Bombet y soit.
Le congrès du PDCI qui devait avoir lieu dans ce mois d'avril a été reporté. Quel est votre commentaire ?
Nous sommes en train de conduire des réflexions. Au terme de nos réflexions, nous allons faire des propositions. Quel est le rôle d'un congrès ? Le rôle d'un congrès, c'est de rassembler les gens, afin de faire ressortir de nouvelles réflexions. Dans un contexte difficile, est-ce raisonnablement ce que notre congrès a proposé en 2002 ? Est-ce cela que nous devons proposer aux Ivoiriens, en 2007 ? Nous disons non. Les choses ont évolué. Il faut qu'on soit capable d'adapter notre discours, notre stratégie à l'environnement. Si on ne le fait pas, on va à notre perte.
Que faut-il faire alors ?
Pour nous, il faut organiser le congrès. Afin de permettre aux militants de se retrouver et de dégager de nouvelles idées. Des idées fortes. Pour une Côte d'Ivoire nouvelle. A moins qu'on ne nous dise que le congrès se limite à élire un président.
Est-ce que vous avez posé le problème à une réunion du parti ?
Nous avons assisté à la rencontre qui reportait le congrès. Au vu de la tournure des choses, nous avons décidé de ne plus parler. Parce que cela n'aurait servi à rien. Puisque les gens refusent de nous écouter. Mais nous sommes en train de conduire une réflexion. Si nous voulons aller à des élections pour gagner, qu'on profite de l'organisation d'un congrès pour rassembler tout le monde. Pour, ainsi, préparer des idées fortes à proposer aux Ivoiriens. Cela n'a pas été fait. D'ailleurs au cours de la réunion en question, on nous a fait entendre que la Côte d'Ivoire est en crise et qu'il était plus urgent de régler cette crise, que d'organiser un congrès. Il faut que les gens arrêtent de nous infantiliser. Au plus fort de la crise, on a trouvé le temps et les moyens d'organiser des conventions dites éclatées, avec toutes les délégations départementales du PDCI. Et cela, dans le but de choisir un candidat, pour aller aux élections de 2005. Si on a pu le faire, pourquoi est-ce qu'on ne peut pas faire un congrès dont l'objectif est de rassembler tout le monde, pour faire de nouvelles propositions? Le débat que nous menions n'est pas un débat de personnes. Bien au contraire. C'est un débat pour permettre au PDCI de se ressouder, afin d'aller résolument à la conquête du pouvoir d'Etat qu'il a perdu dans les conditions que nous devons chercher à comprendre. Avez-vous un message particulier pour les militants du PDCI ?
Nous leur demandons de rester sereins. Nous leur demandons d'éviter de tomber dans les querelles de personnes. Lorsque nous posons des problèmes de fond, les autres veulent nous tirer vers des querelles de personnes. Nous refusons de rentrer dans de tels débats. Nous demandons aux militants de ne pas quitter le PDCI. Le Président Houphouët-Boigny, nous a laissé le parti. Nous ne devons pas le trahir. Nous devons faire en sorte que le parti se fortifie davantage, au fil des ans.

Interview réalisée par
Yacouba Gbané
yacou06336510@yahoo.fr

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