samedi 21 avril 2007 par L'intelligent d'Abidjan

Dans une déclaration à la presse, à la fin de sa rencontre avec Henri Konan Bédié mercredi dernier, le président du Rassemblement des Républicains, le Docteur Alassane Dramane Ouattara a expliqué l'intention des deux leaders de l'opposition de saisir l'Onu afin que Gérard Stoudman, le Haut Représentant des Nations Unies pour les Elections en Côte d'Ivoire reste en poste à Abidjan jusqu'à la fin du processus électoral de la fin de crise. Ils ne croiraient pas en Laurent Gbagbo, de même que leur démarche répond à un souci de surveiller ''le deal'' que le président de la République et son Premier ministre pourrait avoir conclu.

Laurent Gbagbo demeure une épouvante pour son opposition. Qui ne cesse de le taxer de roublard, de celui qui ne respecte pas sa parole. Depuis le Général Robert Guéi, dont le fils aîné vient d'être nommé Conseiller du Président de la République, jusqu'à Seydou Elimane Diarra, président du Forum de la réconciliation, puis Premier ministre issu de l'accord de Linas Marcoussis, les leaders ont peur de faire confiance en Laurent Gbagbo.
Pour les opposants à celui qui fut jadis ''opposant historique'' au régime de Félix Houphouët-Boigny, puis de celui de Henry Konan Bédié à la mort du père de la Nation, faire confiance en Laurent Gbagbo serait faire preuve de cécité, et chercher en voulant trouver une aiguille dans un tas de foin.
Aujourd'hui, avec la signature de l'accord de Ouagadougou le 04 mars dernier, les quatre leaders du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Paix ont commencé par suspecter leur partenaire d'hier.
Celui-ci, en effet, n'avait, dès la déclaration du chef de l'Etat invitant ses adversaires en armes à la table de négociation directe, pas insisté pour que les discussions ne se déroulent que dans le seul cadre de la Résolution 1721 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies. A la fin de ces discussions, Guillaume Soro n'a pas craché sur la primature, au grand dam de ses amis du G7, qui voit en cet acte une trahison. Point de référence à la R-1721 non plus. Ils oublient ainsi que le leader de l'ex-rébellion, dans son adresse, en réponse à l'invitation de Laurent Gbagbo, leur avait demandé de ''se débarrasser du complexe de la rébellion'' aux fins de discuter franchement avec le camp présidentiel.
Que peut avoir promis Laurent Gbagbo à Guillaume Kigbafori Soro pour qu'il accepte aussi rapidement de discuter, et, bien plus, de devenir son Premier ministre au terme de l'accord de Ouagadougou ? Que peut avoir expliquer le maître à l'élève pour que, quelques jours après sa passation des charges avec Charles Konan Banny, le nouveau locataire de la primature dise, brusquement, de Laurent Gbagbo ''mon patron m'a donné des instructions'', ''Monsieur le Président de la République'', puis, dans son message de pardon à la Nation dire, ''choisir l'inertie aurait été, pour les Ivoiriens, synonyme de plus de sang versé, de destruction, de marasme économique et de misère. La raison et l'amour de notre pays nous ont commandé de prendre le seul parti qui vaille : le parti de la vie, le parti de la paix, le parti de la réconciliation'',etc., finissant, ainsi, de convaincre ses alliés d'hier de son revirement ? Telle est l'équation qui hante les nuits de Henri Konan Bédié et de Alassane Dramane Ouattara, qui ont fini par se convaincre que le petit a pris ses marques, et entend assumer pleinement son destin. Comme dirait l'autre, ''c'est l'homme qu'on ne connaît pas qu'on appelle héé!''.
Et, se disant suffisamment connaître Laurent Gbagbo adversaire pour les prochaines élections générales, les candidats du Pdci et du Rdr perdent toute sérénité quant à l'organisation des différents scrutins. Le Front populaire ivoirien occupe le ministère de l'Intérieur, ceux du Plan et du Développement, de la Défense et de la Sécurité, tous les quatre en charge de l'organisation, de la préparation et de la surveillance du processus électoral. Sans oublier l'économie et les Finances.
Par mesure de précaution, les présidents du Pdci et du Rdr voudraient appeler l'Onu au secours, puisque leur allié d'hier semble ne plus suivre ''le mouvement'', ayant clairement signifié qu'il n'est pas candidat pour la prochaine présidentielle. Et après ? Bédié et Ado pouvant être atteints par la limite d'âge en 2013. En donnant le sentiment de mettre en garde contre tout hold-up électoral de Laurent Gbagbo, Bédié et Ado ne font en vérité que manifester une méfiance et une mauvaise humeur vis-à-vis de Guillaume Soro. La balle est donc dans le camp du Premier ministre. Le petit Gbagbo qui veut devenir grand est à l'épreuve d'un réel défi : rester partenaire avec Laurent Gbagbo, le rassurer sans jamais casser le socle G7 que Ado et Bédié veulent constituer pour lui. L'état de grâce n'aura pas trop duré. Chacun est à l'?uvre et à la man?uvre.
Laurent Nahounou
laurentnah@yahoo.fr

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