samedi 21 avril 2007 par Le Nouveau Réveil

"Je les savais méchants, mais je ne les croyais pas capables d'une telle extrémité, d'une telle énormité judiciaire, d'une décision aussi scandaleuse que répugnante. C'est une parodie de justice". Ces mots pleins de révolte du vice-président N'guessan Koffi Bernard traduisent le sentiment général de tous ceux qui ont suivi, hier, au palais de justice d'Abidjan l'apothéose du "procès de la honte", celui intenté par le chef de l'Etat contre le ministre Kobenan Kouassi Adjoumani. Cela fait en effet plusieurs mois déjà que les débats ont pris fin et que nous étions dans l'attente d'un verdict. Le procureur avait requis, les avocats avaient plaidé, il ne restait plus aux juges du siège que de trancher. Mais apparemment cette décision n'était pas facile à prendre, disons que les magistrats n'étaient pas totalement libres de juger selon le droit et leur intime conviction. En témoignent les reports successifs d'audience, il nous est même revenu que le président du tribunal d'Abidjan et les magistrats qui avaient le dossier en main n'étaient pas sur la même longueur d'onde. Les premiers cités désiraient se déclarer incompétents à juger un député couvert par son immunité parlementaire, le second tenait à ce que l'on condamne M. Adjoumani coûte que coûte. Et puis, coup de théâtre. Hier matin, le tribunal change de visage. Tous les magistrats qui ont dirigé les débats à savoir le juge Allou Aka (président de séance) et son 1er assesseur le juge Porquet sont bottés à la touche par le président du tribunal d'Abidjan. Et remplacés par des juges qui sont disposés à faire l'affaire c'est-à-dire la condamnation d'Adjoumani. Tel des mercenaires, sans aucune pudeur juridique et sans état d'âme, le trio composé par Lasme Melèdje, Kpandé Silvain et Mme Dreupeuba vont prononcer la sentence de la honte. Ce sont ces magistrats ( ?) qui ont osé condamner sans avoir jugé. Malgré l'insistance des avocats de la défense, ils ont refusé de lire le verdict des premiers juges. Ils étaient en mission commandée, ils sont arrivés, ils ont exécuté et ils sont repartis, tranquillement. Ce que les premiers juges refusaient de faire, ils l'ont fait. Sans frémir, heureux d'avoir honoré la volonté du chef, de leur mandant.
On peut les saluer et les féliciter, car eux ont été courageux, ils ont osé là où les autres ont reculé. Le grand seigneur de la refondation ne devrait pas tarder à les récompenser s'il ne l'a fait déjà. Adjoumani a été donc jugé ( ?) et condamné. Mais à y voir de près que gagne Gbagbo ? Quelle gloire peut-il tirer de cette condamnation et de cette procédure de complaisance ? Rien, car à la vérité ce procès est un échec de Gbagbo. Il a perdu depuis longtemps son empoignade avec le député de Tanda, il a perdu la bataille des arguments, dans la forme comme dans le fond. Il a essayé de s'éclipser à un moment du public quand il s'est rendu compte que la procédure en action directe qu'il avait intentée était illégale. Au cours des débats, les avocats de M. Gbagbo n'ont jamais réussi à faire la preuve que le député Adjoumani était justiciable devant le tribunal correctionnel. Ils n'ont jamais pu démontrer que le délit d'offense au chef de l'Etat était constitué sous le double angle des législations ivoirienne et italienne. Malgré tout, ils ne se sont pas inclinés devant la raison et le droit. On a mis le droit en cage et on a célébré l'arbitraire. Le ministre Adjoumani qui, en dépit de son immunité, a voulu par respect pour les institutions, déférer à la convocation des honorables magistrats doit aussi se rendre compte à présent que les institutions ne valent que par ceux qui les incarnent. Le PDCI-RDA et surtout le RHDP doit analyser ce qui vient de se passer comme un avertissement solennel. Gbagbo peut faire dire à la justice tout ce qu'il veut. Et dans la perspective des élections futures, c'est dangereux !

Akwaba Saint Clair

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