mercredi 18 avril 2007 par Le Patriote

L'armée française amorce, cette semaine, la réduction de ses effectifs en Côte d'Ivoire, justifiée par le "nouveau contexte politique de réconciliation" né de la signature de l'accord de Ouagadougou en mars. L'ancien président du Conseil constitutionnel français, Pierre Mazeaud, artisan des accords de Marcoussis en 2003, réagit sur l'expresse.fr Que reste-t-il de l'accord de Marcoussis, dont vous avez présidé les travaux, dans celui de Ouagadougou?
L'accord de Ouagadougou, et j'insisterai sur ce point, reprend mot à mot celui de Marcoussis. On ne le dit pas assez, mais en réalité quatre années auront été perdues dans le règlement de cette crise. Sur les questions relatives au désarmement, au processus électoral, au code de la nationalité, l'exposé des motifs est exactement le même. J'avais réussi à réunir autour d'une table des gens qui se détestaient, et qui ont fini par se parler, unis par l'intérêt qu'ils portent à leur pays. Tous les participants ont signé cet accord soutenu par toute la communauté internationale, ils étaient tous très optimistes. Pourquoi est-il resté lettre morte?
Je ne souhaite pas entrer dans la polémique, mais je pense que la faute en incombe à beaucoup de monde, à commencer par certains responsables français, y compris dans l'entourage de Jacques Chirac. Ce dernier m'a demandé de présider les travaux, le ministère des Affaires étrangères n'y était pas opposé, mais en coulisses, ils étaient nombreux à être persuadés que la conférence échouerait. On a voulu faire "capoter" cette opération, et pas seulement en France. Je ne suis pas sûr qu'en Afrique, certains dirigeants n'aient pas joué un rôle dans ce sens. Il aurait fallu à cet égard s'en tenir au rôle des responsables ivoiriens eux-mêmes, comme Guillaume Soro, dont j'ai d'ailleurs à l'époque préconisé l'entrée dans le gouvernement d'union nationale.
L'accord de Ouagadougou mènera-t-il la Côte d'Ivoire vers la paix?
Avec l'accord de Ouagadougou, nous sommes arrivés à la fin d'un conflit. La Côte d'Ivoire sort d'un tunnel et on ne peut que se réjouir de cette situation pour ce pays, pour la France et même pour l'ONU, qui ne pourra proroger indéfiniment le mandat de Laurent Gbagbo. La France n'aura bientôt plus de raisons de maintenir une présence militaire dans cette zone du monde. J'espère que cet accord permettra à la Côte d'Ivoire de parvenir à une plus grande sérénité, pour elle-même et pour l'ensemble des pays d'Afrique de l'Ouest. Il est souhaitable qu'elle y parvienne le plus rapidement possible. Une donnée me semble à cet égard capitale: c'est la nomination de Guillaume Soro comme Premier ministre. La réduction annoncée du contingent militaire français est-elle un prélude à une redéfinition des rapports entre la France et la Côte d'Ivoire?
La France va certainement être amenée à redéfinir ses relations avec la Côte d'Ivoire, mais je pense qu'elle doit revoir entièrement ses rapports avec l'Afrique en général. Notre pays a perdu de son influence en Afrique: politique - ce qui est normal car nous n'avons plus à dicter leur conduite politique aux Africains, mais surtout économique et sociale. Nous avons été supplantés par la Chine et les Etats-Unis. Nous devons reprendre le contact avec nos amis africains, ne serait-ce que parce que nous avons en commun l'usage du français et la défense de la francophonie. Il faut reprendre le dialogue sur la situation économique et le développement des pays d'Afrique noire francophone et revoir notre rôle vis-à-vis d'un continent qui nous est très attaché et auquel nous devons être, nous aussi, attachés.
(Source : l'express.fr)

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