mardi 10 avril 2007 par Le Nouveau Réveil

A coups de poker menteur, Laurent Gbagbo et Guillaume Soro, les deux "frères ennemis" des années FESCI (Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire), ont mis dans le vent la France et les chefs de l'opposition ivoirienne "non armée". Le tapis vert du "dialogue" est animé depuis Ouagadougou par Blaise Compaoré, l'ex-Sleeping Partner de la rébellion qui a redistribué les cartes. Une nouvelle partie "électorale" va commencer avec un jeu tout neuf ! Gbagbo/Soro, "je t'aime moi non plus". Le 8 avril, le grand frère président et le petit frère premier ministre - Guillaume Kigbafori ("l'invincible" en sénoufo) Soro - devraient sortir la liste du nouveau gouvernement ivoirien. Dans l'immédiat, le plus grand atout de Soro (et de son allié Louis-André Dacoury-Tabley) est sa connaissance intime de Laurent Gbagbo. Dans les années 90, au sein de la FESCI, l'étudiant révolté était en effet si proche de "Laurent" qu'il s'en souvient dans son autobiographie publiée en 2005 comme de son "père spirituel" en politique. Mais le chef du FPI l'avait "dribblé" en 1998 en imposant Charles Blé Goudé, un Bété, à la tête de la Fédération estudiantine et scolaire. Cependant le danger pour "Guillaume", c'est que "Laurent" a toujours un coup d'avance. Le président a déjà pris contact avec les principaux "commandants de zone" dans le Nord, la base militaire de Soro. Bien plus "seigneurs de guerre" que rebelles, les Wattao (Chérif Ousmane) et autres Wetcho (Hervé Touré) lui ont fait connaître leur "prix" : un grade élevé dans l'armée unifiée, sinon du cash : 1 million ? pour l'un d'entre eux. Au cas où la "cogestion" tournerait mal, le chef de l'Etat qui dispose d'une formidable cagnotte (bonus pétroliers, amende Trafigura, recettes du cacao, etc.) saura donc comment "déshabiller" son associé au pouvoir. Pour éviter "une nuit des longs couteaux" dans son propre camp, Soro aurait obtenu de Compaoré la mise à sa disposition de 350 commandos-gendarmes pour assurer sa sécurité.
La fatigue du "Beau Blaise". Parrain discret mais très actif de la rébellion, le président Blaise Compaoré a été l'élément déterminant dans le dialogue direct Gbagbo/Soro. Il a compris que la crise ivoirienne risquait à moyen terme de mettre le feu à sa propre maison. Déjà, les violents combats à Ouaga, au mois de décembre, entre les policiers enrichis par tous les trafics du Nord de la Côte d'Ivoire et des officiers sans commandement qui se sentaient laissés-pour-compte, lui a laissé un goût très amer dans la bouche... Le chef de l'Etat était encore grimaçant au sommet Afrique-France de Cannes. Par l'intermédiaire de proches de Jacques Chirac, il a même demandé à ce qu'une équipe de la DGSE (services secrets français) se rende au Burkina Faso pour surveiller un peu son armée... Déçu par les chefs de l'opposition ivoirienne, Blaise Compaoré a compris qu'il fallait "dealer" rapidement avec Laurent Gbagbo et se positionne désormais comme le "grand pacificateur" de la région (Togo, Mauritanie, Côte d'Ivoire...). Paris et ses "Cendrillons" aux pieds nus. A l'évidence, les dirigeants français ont sous-estimé le président Laurent Gbagbo et surestimé "ses" premiers ministres ainsi que la pugnacité des deux chefs de l'opposition : Henri Konan Bédié (PDCI) et Alassane Dramane Ouattara (RDR). Présente chaque mois à Abidjan, la ministre de la Coopération Brigitte Girardin a tenté, au sein du GTI (Groupe de travail international), de sacrer le premier ministre en Charles Konan Banny Ier au détriment du président Gbagbo. Mais le carrosse s'est transformé en citrouille, de la même façon que celui de son prédécesseur, Seydou Diara, nommé comme "le sauveur" au sommet de Kléber en 2003. Dans le même temps, Paris a ?uvré dans l'ombre pour que Bédié et Ouattara, supposés unis au sein d'un improbable Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), soutiennent Banny comme un seul homme. Mais tous deux ont surtout vu le "gouverneur" comme un challenger de plus. D'autant que "CKB" s'est mis en apesanteur, au-dessus de tous les partis, jusqu'à ce qu'il ne pèse lui-même plus rien...
Source : La Lettre du Continent N°515 du 5 avril 2007

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