jeudi 16 juillet 2009 par Fraternité Matin

Le S.G du Synesci, Diomandé Mamadou, explique, au nom du collectif des syndicats, ce qu'induit le décret du 29 juin 2009 pris par le Chef de l'état.



M. le secrétaire général, vos collègues et vous avez obtenu gain de cause par rapport à vos revendications. Pouvez-vous nous rappeler ce que vous avez obtenu du Chef de l'Etat et comment vous y êtes arrivés?



Il faut dire que la question du profil de carrière remonte à loin. Depuis 1992, il y a eu la réforme du statut général de la fonction publique, et déjà à cette époque, le secteur éducation formation a été mis à l'écart. Puis en novembre 2000, le gouvernement a initié un projet de profil de carrière au profit des enseignants. Des séminaires se sont tenus en 2001 et 2002 et un premier draft a été élaboré à la réunion de Yamoussoukro qui avait rencontré l'adhésion de tous. Malheureusement, la guerre a freiné cet élan. Mais le 31 décembre 2007, nous avons obtenu le premier décret qui a permis de faire un grand pas dans la question du profil de carrière, et enfin le dernier de juin 2009 qui, en quelque sorte, clôt définitivement la question.



En quoi ce dernier décret clôt-il définitivement la question?



Ce décret clôt définitivement la question du profil de carrière en ce sens que le profil que nous avons demandé, offre une possibilité d'évolution du grade le plus bas selon le secteur d'activité dans le domaine de l'éducation où nous sommes, jusqu'au plus élevé de la fonction publique qui est le grade A7.Et depuis le 31 décembre, nous avons la possibilité de partir du grade C3 au grade A7. Mais, il y avait entre-temps au milieu, les grades A1 et A2 qui n'existaient que dans notre secteur et qui ont été supprimés par le décret du 31 décembre 2007. Dans le secondaire et assimilés, nous débutons au grade A3 et nous terminons au grade A7.



A quoi équivaut concrètement le grade A7, en termes de niveau de salaire?



Le grade A3 est le premier désormais dans le secteur du secondaire et assimilés (éducateur permanent, professeur de Cafop, professeur de collège ) et nous finissons avec l'inspecteur général de l'éducation nationale qui est au grade A7.



A quel grade le professeur de collège, par exemple commençait sa fonction?



Il débutait au grade A1.



Combien percevait?il comme salaire?



Il était payé à l'indice 1015 qui correspond à environ 256.000 CFA comme salaire net mensuelle. Désormais, donc il recevra il sera payé à l'indice 1225 environ 311.000 CFA.



Vous êtes donc satisfaits. Pouvez-vous nous dire si les examens qui se sont tenus iront jusqu'à leur terme, corrections et proclamation des résultats y compris.



Je peux le dire, car tous ont affirmé qu'ils levaient leur mot d'ordre de grève, il n'y a aucune menace qui plane sur l'école et les examens du côté des enseignants. Les petits troubles que l'on a constatés sont dus au fait que le mot d'ordre de grève a duré jusqu'à la veille du début des oraux, si bien que les secrétariats n'ont pas été en mesure de faire le travail préalable de préparation des centres et autres. C'est ce qui a fait que par endroits, on a pu prendre du retard. Mais tout est vite rentré dans l'ordre. Et les choses devraient se passer sans problème.



Combien d'enseignants sont concernés par ce nouveau décret?



Ce nouveau décret concerne tous les enseignants du secteur de l'éducation et de la formation. Au niveau du primaire, il y a eu une bonification indiciaire par rapport à cette nouvelle possibilité d'évolution qui a été décidée. Mais au niveau du secondaire, des grades ont été supprimés et ceux qui sont en poste actuellement doivent occuper les nouveaux emplois. C'est-à-dire qu'il n'y a plus de professeur CAP CM, il n'y a plus de professeur certifié ou licencié, il y a désormais les professeurs de collège et de lycée. Ainsi tous ceux qui étaient des professeurs CAP CM doivent intégrer les fonctions de professeurs de collège et tous ceux qui étaient des professeurs certifiés ou licenciés doivent intégrer celle de professeurs de lycée. Ce processus était déjà engagé et d'ailleurs, ce nouveau décret le consacre. Pour résumer, disons que tout le monde est concerné et satisfait de ce décret qui vient d'être pris et qui consacre le reclassement pour ceux qui sont du secteur secondaire et assimilés à partir du 1er novembre 2009. Ceux qui ont bénéficié d'un réajustement indiciaire seront également pris en compte à partir de cette même date. Donc, il y satisfaction totale.



Pour l'amélioration du système scolaire ivoirien de façon générale, que peut-on attendre des enseignants?



Il faut dire que la question du profil durant depuis les années 2000-2001, aujourd'hui, il est clair que les discussions pour la revalorisation salariale vont se poursuivre. Le décret le précise d'ailleurs. Pour l'heure et comme le gouvernement a décidé d'une réforme du monde du travail, disons que pour le secteur de l'éducation, il s'agit d'un premier pas de franchi et c'est tant mieux pour nous et pour tout le monde, car il y a espoir que la suite sera beaucoup plus calme.



Plus calme et plus studieuse s'entend, parce qu'aux enseignants aussi, on reproche beaucoup de choses. Quelle est votre part de responsabilité dans la dégradation de l'école, selon vous?



Chaque partie a sa part de responsabilité. L'Etat a sa part et nous avons la nôtre. Qui porte la plus grande part ? On ne saurait le dire ici. Cela dit les élèves et leurs parents ont aussi leur part de responsabilité. Et ce n'est pas parce que nous avons posé des problèmes qui existent réellement, pour lesquels le gouvernement vient de trouver des solutions, qu'on dira que toute la responsabilité incombe aux enseignants. Nous avons notre part, nous le reconnaissons. Nous savons aussi que nous avons l'obligation de veiller à ce que nos camarades se mettent au travail effectivement, pour que nous puissions ensemble relever le niveau de l'école. Mais, que chacun joue sa partition.



Comment voulez-vous jouer concrètement votre partition?



Nous sommes les porte-parole des enseignants, nous avons des préoccupations que nous posons, mais aussi nous avons l'obligation de nous mettre au travail. Car nous sommes des travailleurs et c'est en cette qualité que nous agissons, que nous avons la possibilité et même le droit selon la constitution de nous organiser en syndicats pour poser les différents problèmes que nous rencontrons. Donc si nous sommes en droit de demander à l'Etat, au gouvernement d'améliorer nos conditions de vie et de travail, il est clair que nous devons être au travail. Donc notre part de responsabilité, c'est de faire en sorte que nos camarades soient au travail, que l'école aille, mais que le gouvernement également fasse sa part. En tout cas, nous, nous prenons l'engagement de faire la nôtre. C'est vrai qu'il doit y avoir une véritable conscientisation, mais il n ?y a pas que le secteur de l'éducation qui est concerné, car nous sommes en train de sortir d'une crise. Nous sommes heureux que cela en soit ainsi, et nous réaffirmons que nous ferons notre part, mais que chacun fasse la sienne.



Avez-vous une idée de ce que ces changements de grade induisent au plan financier?



Le ministre de la Fonction publique, nous a indiqué, documents à l'appui, que cette réforme coûtait au ministère de l'Education nationale environ 57 .600.000.000 FCFA par an, dont 27.600.000.000 pour le secondaire. Mais nous sommes d'accord que l'Etat doit faire cet effort, parce que nous répétons que la suppression des grades A1 et A2 consacrait, comme nous l'avons dit tantôt, la réparation d'une injustice. Car, il faut dire, c'est seulement dans le secteur éducation que nous étions ainsi limités au grade A3, les grades A1 et A2 n'existant que dans ce domaine. Aujourd'hui, nous avons la possibilité d'aller au delà de ce grade.



Des enseignants sont de plus en plus impliqués dans la promotion de contre valeurs telles que la fraude, l'absentéisme, etc. Quel est le programme du collectif pour aider à juguler ces maux, maintenant que vous avez obtenu satisfaction quant à vos revendications?



Merci madame pour cette question très importante, car la question des salaires soulève beaucoup de passion, de tensions inutiles si vos déclarations ne sont pas bien comprises. Cela dit, nous envisageons, au niveau du collectif, d'organiser un séminaire pour faire l'état des lieux dans le but de rechercher des solutions pour améliorer le rendement des enseignants. Nous devons le faire, surtout parce qu'ils sont de plus en plus jeunes, si bien qu'ils n'appréhendent pas toujours bien le passage de la vie estudiantine à la vie professionnelle. Nous avons donc le devoir, en tant que responsables syndicaux, de les accompagner dans leur intégration. Le collectif a donc pris l'engagement de faire bénéficier aux enseignants de formations en vue d'améliorer nos prestations.



Que pensez-vous des déclarations faites ces derniers jours par des enseignants dans la presse concernant des fraudes massives qu'ils auraient constatées dans divers centres au cours de l'examen du Baccalauréat?



Nous dénonçons toute fraude aux examens et en tant qu'acteur privilégié du système éducatif, nous travaillons à l'amélioration du système. C'est pour cela que le collectif condamne avec la dernière énergie toute forme de fraude aux examens. Il nous appartient de donner du crédit à nos diplômes. Dans ce que j'ai lu dans Frat- Mat, il y a un peu de légèreté, il faut le dire. Parce que l'enseignant qui est dans la salle et qui constate une fraude, est aussi responsable que le chef du secrétariat, le chef du centre et même le président du jury. Donc à son niveau, il a la possibilité de gravir tous les échelons pour faire arrêter la fraude. Nous sommes tous comptables de ce que le système est bon ou mauvais. C'est dommage que pour des actes qui ont été perpétrés il y a deux ans, la dénonciation publique ne vienne que maintenant. Mais comme il s'agit de pratiques qui sont devenues récurrentes, il nous appartient, en tant que structure syndicale, d'aller d'abord vers nos camarades pour que chacun fasse sa part pour la réussite des examens, qui sont des moments d'évaluation importants. Plusieurs contingences entourent les examens, il y a beaucoup d'autres acteurs qui sont impliqués, mais il convient, en accord avec le ministère, de s'asseoir pour définir les conditions de sécurisation des examens, pour les années à venir.



L'un d'entre eux prétend qu'il aurait été victime de représailles lorsqu'il y a deux ans il a dénoncé ce fait. Si ce cas est avéré, l'enseignant a-t-il un recours auprès de son syndicat?



Dans un premier temps, en tant qu'enseignant, quand il subit un tel traitement, les premières personnes qu'il doit informer ce sont les responsables syndicaux, qui eux ont la latitude de donner une grande envergure à l'affaire. Mais, ce sont des faits que nous apprenons maintenant, et encore, par presses interposées, or le bon sens aurait voulu que nous en soyons informés et que nous entrions en contact avec le ministère, ce qui aurait même permis d'assurer la sécurité de celui qui dénonce ces faits. Parce que si on veut encourager les enseignants à dénoncer la fraude et tout suspect, il faut aussi que certaines dispositions soient prises. Et les premières personnes habilitées à défendre ce droit du travailleur, c'est nous. Dans tous les cas, bien que ce soit par presses interposées, nous en sommes saisis et nous allons entrer en contact avec le ministère, afin que ces choses ne se répètent pas.



Pensez-vous que ces déclarations puissent amener à l'annulation de la session 2009?



Tout dépendra de la dimension de la fraude. S'il est avéré que dans la plupart des centres, elle a été plus que flagrante, cela va porter un coup à la crédibilité de cette session. Mais tout dépend également des procès-verbaux qui vont être dressés. Ces faits ont-ils été signalés aux chefs de centre, aux présidents de jury ? Si rien n'a été fait, il n'y aura pas assez d'éléments déterminants pour remettre en cause la session 2009.



Cet entretien s'achève



Nous voulons saisir l'occasion pour remercier le Chef de l'Etat pour l'acte qu'il vient de poser en rétablissant les enseignants et l'ensemble des membres du collectif dans leur droit en ces périodes difficiles. Nous saluons également la part importante que nos ministres Amani N'Guessan et Bleu-Lainé et leur pair de l'Economie et des Finances Koffi Diby ont prise dans cette action. Nous invitons nos camarades à se mettre résolument au travail.



Interview réalisée par
Josette Barry

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