vendredi 26 juin 2009 par Le Repère

Il y a peu, la presse a fait écho de ce que de faux extraits de naissance ont été saisis dans le département de Bloléquin, qui portent la signature de l'ancien sous-préfet de cette localité, devenu aujourd'hui directeur de l'état-civil au ministère de l'Intérieur. Après des investigations, Le Repère? est en mesure de dire comment les choses se sont passées.

Dans le déroulement des opérations de rattrapage de l'indentification à l'intérieur du pays, la Commission locale de supervision de l'identification (CLSI) de Bloléquin a constaté des irrégularités sur certains extraits de naissance que présentent des pétitionnaires. Ces extraits ont en commun la signature de l'ancien sous-préfet de Bloléquin, M. Kipré Guiounou, actuellement directeur de l'état-civil au ministère de l'Intérieur. Ils ont également été tous signés entre mars et avril 2005. Mais le plus curieux est que tous ces extraits signés en 2005 portent des timbres fiscaux de 2008. Comment cela peut-il être possible ? C'est donc pour en avoir le c?ur net que le président de la CLSI, M Kahi Dezon Léopold, a saisi par courrier du 16 juin 2009, le président départemental de la Commission électorale indépendante (CEI), M. Tieh Bouhou Victorien. Dans ce courrier, après explications des remarques, le président de la CLSI demande que lesdits extraits soient soumis à contrôle et à vérification dans les registres de la sous-préfecture de Bloléquin. Dans sa réponse du 18 juin 2009, rédigée après une réunion d'urgence des commissaires de la CEI, le président départemental de la CEI a décidé de surseoir à l'enrôlement des pétitionnaires détenteurs desdits extraits, en attendant que la CLSI au grand complet tienne une réunion afin de statuer sur cet épineux problème.


Le FPI se démasque

Le même jour, une visite du centre d'enrôlement de Zéaglo a été organisée par le Comité de suivi des opérations d'enrôlement composé du président départemental de la CEI, du président de la CLSI, du coordonnateur départemental de SAGEM, du coordonnateurs départemental de l'INS, du coordonnateur départemental de l'ONI et accompagné par la Division électorale de l'ONUCI basée à Duékoué. Après constat sur place à Zéaglo, le président départemental de la CEI a conseillé d'aller vérifier l'authenticité des extraits à la sous-préfecture de Bloléquin. Mais en attendant, qu'il soit sursis à l'enrôlement des pétitionnaires détenteurs desdits extraits. Comme piqué au vif, le fédéral FPI de Bloléquin, connu sous le pseudonyme de Ziah Raymond (Il a un autre nom à l'état-civil) porte plainte auprès du préfet, le capitaine de Frégate Gnosékan contre les responsables locaux de la CEI, de l'ONI, de SAGEM, de la CLSI et de l'INS qui, selon lui, ont fermé des centres d'enrôlement. Le préfet convoque immédiatement une réunion avec lesdits responsables. Ceux-ci expliquent au préfet ce qui se passe et rappellent qu'aucun centre d'enrôlement n'est fermé. Ils ont juste demandé de surseoir à l'enrôlement des détenteurs des extraits à problème. Après le préfet, c'est le secrétaire général de la préfecture, M. Zahouéla Albert, qui les convoque le lendemain. Il leur fait comprendre qu'un ordre est venu de M. Zoguéhi du ministère de l'Intérieur leur demandant d'accepter les 5000 extraits en question (le chiffre 5000 est venu du SG de la préfecture). Parce que selon lui, la CEI ne peut se substituer au ministère de l'Intérieur pour la délivrance des pièces administratives. D'ailleurs toujours selon lui, une structure pour remettre tout en ordre quant au processus sera prochainement créée, à quoi la CEI devra se soumettre. En ch?ur, les responsables locaux ont dit non à cet ordre qu'ils ont trouvé étrange et déplacé. Ils sont des commissaires de structures autonomes qui ne sauraient recevoir d'ordre d'aucune autre structure, fû-t-elle le ministère.


La tentative de corruption

La tentative d'intimidation ayant échoué, les dirigeants locaux du FPI changent leur fusil d'épaule. Ils engagent la négociation avec les responsables locaux de l'identification. Et c'est Madame Sahin Eugénie, membre de l'OFPI de Bloléquin et très proche de M. Tchéidé Gervais et M. Sio Eloi, un autre proche de Tchéidé Gervais, qui vont vers les dirigeants locaux de la CEI. La réunion a eu lieu le 19 juin. Ils leur demandent de laisser tomber l'affaire et d'accepter les extraits de naissance litigieux. Mieux, selon nos sources, les envoyés bénévoles du FPI auraient même proposé séance tenante la somme de 100.000 FCFA à leurs interlocuteurs qui ont poliment décliné l'offre. Le faisant, le FPI venait ainsi d'avouer qu'il est l'auteur des actes frauduleux. L'un des commissaires de la CEI a même conversé au téléphone avec M. Tchéidé Gervais qui aurait aussi tenté de l'intéresser à abandonner le dossier. Là encore, l'offre aurait été déclinée poliment. Alors ne sachant plus quoi faire, le fédéral FPI, devant les locaux de la préfecture de Bloléquin, a ouvertement menacé le président départemental de la CEI, lui indiquant que si les extraits en question ne sont pas pris en compte, il sera responsable des troubles qui pourraient surgir. On apprendra par la suite que les extraits frauduleux auraient été confectionnés à Abidjan, au Plateau dans un bureau des Impôts juste derrière les bâtiments de la SITARAIL. Ils auraient été convoyés par les soins de Sio Eloi. Par qui a-t-il été envoyé ? Suivez donc mon regard.


Les preuves du faux

Quelles sont en fait les irrégularités des extraits saisis par la CLSI et la CEI locales de Bloléquin ? Si on prend le cas par exemple de celui de Guéi Alexis, né le 1er janvier 1952, déclaré sous le numéro 3081 du 30 juin 85, on se rend compte que c'est une déclaration hors délai. Un numéro de transmission du jugement supplétif devrait mentionner sur l'extrait de naissance. Toute déclaration faite hors délai doit forcément passer par le tribunal.

Par ailleurs, le timbre à sticker qui est sur ces extraits signés en 2005, n'existait pas en 2005. Ce qui revient à dire que les extraits ont été anti-datés ou tout simplement la signature du sous-préfet est fausse ou encore elle a été scannée et standardisée pour être posée sur tous les extraits confectionnés à dessein. Pire, aucun de ces extraits n'a sa source de référence dans les registres de la sous-préfecture de Bloléquin. Preuve qu'ils ont été fabriqués hors de Bloléquin. Si les extraits ont été faits en 2005, qu'attendaient donc les détenteurs pour ne pas se présenter à une seule séance d'enrôlement de l'année dernière ? Et puis, tous les 5000 extraits ont été signés entre avril et mai 2005, soit en deux mois. Un petit calcul montre que le sous-préfet Kipré aura signé quelques 112 extraits par jour sans compter les autres documents administratifs, les réunions, les déplacements. La moyenne de documents signés par jour dépasse rarement 50 à la sous-préfecture de Bloléquin. Quelle urgence y avait-il en 2005 pour que le sous-préfet fasse cette extraordinaire prouesse ?

Eddy PEHE

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