dimanche 13 janvier 2008 par AFP

BOUAKE ? Massés en files indiennes devant une caserne de Bouaké (centre de la Côte d'Ivoire), plus d'une centaine d'ex-rebelles ivoiriens attendent leur démobilisation, l'espoir pour beaucoup d'une vie meilleure après cinq ans de crise.

Sanglée dans un treillis neuf et portant des lunettes fumées, le caporal Mariam Bamba, 38 ans, fait partie de ces ex-combattants venus se faire enregistrer dans le cadre du processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR).

Tenté en vain à plusieurs reprises, ce processus a été relancé le 22 décembre par le président Laurent Gbagbo et le Premier ministre Guillaume Soro, chef de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN).

Selon les premières estimations du gouvernement, il concernerait environ 45.000 combattants, dont 33.000 ex-rebelles et 12.000 supplétifs aux troupes du président Gbagbo.

"L'armée ne m'intéresse pas. C'est trop sauvage", explique Mariam, une ancienne commerçante qui ne cache pas sa satisfaction à l'idée de retrouver son métier.

"Après la crise, j'enlève l'uniforme. Je suis trop indépendante d'esprit pour subir des ordres", ajoute cette femme, l'une des rares dans ce groupe d'ex-combattants du "bataillon Anaconda" des FN.

Avant de retourner à la vie civile, les anciens rebelles passent par une opération de recensement, le "profilage".

Mariam s'entretient avec deux agents du Programme national de réinsertion et de réhabilitation communautaire (PNRRC) à qui elle décline son identité, ses origines et formule des souhaits quant à son avenir professionnel.

Ensuite, un autre agent la photographie et relève ses empreintes digitales, avant de lui délivrer un récépissé. Ce sera le sésame pour décrocher l'aide financière de l'Etat ivoirien pour la réinsertion des ex-combattants.

"La réinsertion? Je veux bien y croire mais je ne veux pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué", déclare Mariam, sceptique.

Ce jour-là, avant le début du "profilage", un des chefs de guerre des FN, le commandant Shérif Ousmane, vient pourtant rassurer les ex-combattants, massés devant le bâtiment qui porte dessiné sur son fronton un anaconda, accompagné du slogan: "la patrie ou la mort, nous vaincrons".

"Si vous avez 30 ou 40 ans comme moi, ce n'est pas la peine de vouloir entrer dans l'armée. C'est un métier très difficile et il y a des conditions à remplir", prévient le chef militaire dans un silence religieux.

Selon l'accord de paix conclu en mars 2007 entre le président Gbagbo et Guillaume Soro, une partie des troupes rebelles pourra être intégrée dans l'armée régulière.

Mais cette question sensible, notamment le quota d'ex-rebelles à intégrer et la conservation des grades délivrés par les chefs de guerre, n'est toujours pas tranchée.

Pour les autres, ce sera la vie civile avec, pour ceux qui n'ont pas d'emploi, la possibilité d'entrer dans un "service civique".

A Bouaké, nombre d'ex-rebelles sont déjà retournés de fait à la vie civile, comme Amidou Koné, arrivé précipitamment au "profilage" en tenue civile.

"Moi, je suis mécanicien, j'ai juste besoin qu'on me donne de l'argent pour mieux m'installer", affirme le jeune homme de 32 ans en essuyant ses mains tâchées d'huile de moteur.

D'autres de ses camarades vaquent aussi à leurs anciennes occupations et ne se rendent au camp millitaire délabré que le matin pour le "rassemblement au drapeau".

Signe de cette désaffection, le bataillon Anaconda ne comprend plus que 765 combattants sur un effectif initial de 2.000 soldats au moment de la tentative de coup d'Etat de septembre 2002 des FN et de la prise de contrôle de la moitié nord du pays

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