samedi 29 décembre 2007 par Le Patriote

Coucou les revoilà ! Il était grand temps que Yodé et Siro redonnent de la voix. Voici six ans qu'on n'avait plus entendu le robuste duo (au propre comme au figuré) du Zouglou. Depuis le mardi 18 décembre, ils sont enfin de retour. Et de quelle manière ? Le groupe vient de jeter dans les bacs Signe Zo , son dernier cru, disponible chez Showbiz&Co. Un album, de 14 titres, qui tranche de toute évidence avec leurs quatre précédentes ?uvres : Asec/ kotoko , Asec/Kotoko, le retour (sortis sous la bannière Poussins Chocs), Victoire et Anti-Laléca . D'abord, musicalement, Signe Zo impressionne par la qualité du son, assez bonne, et la belle harmonie de l'orchestration musicale. On n'est pas trop surpris quand derrière se trouve, à la batterie, Pepito, l'un, sinon le meilleur des batteurs de Côte d'Ivoire, à la guitare solo le célèbre Auguy Solo dont le doigté force autorité et respect dans le milieu musical. Aux ch?urs, le casting fait également saliver : Lato Crespino, Jean Roger, Louiso et Pazo (Mercenaires)Tous, des voix couronnées du Zouglou. Au pupitre technique, se cache le très effacé mais talentueux arrangeur Olivier Blé, qui a sans doute donné à cette ?uvre ce visage plaisant qu'il arbore aujourd'hui. L'album alterne volontiers rythmes chauds et mélodies langoureuses. On danse avec Signe Zo , on écoute avec plaisir et émotion Cruel destin . La voix enrouée de Yodé se mêle à celle plus vive de Siro pour donner un charme à l'?uvre.

Des textes acerbes
Mais, là où Yodé et Siro frappent fort, c'est indéniablement au niveau des textes. Certes, ces deux-là nous avaient bien habitués à cette facilité déconcertante de tourner, avec un humour décapant, en dérision les situations les plus cocasses voire dramatiques. On se souvient encore comment ils avaient fait rire toute la Côte d'Ivoire avec le drame des affrontements sanglants ivoiro- ghanéens, suite aux échauffourées du match de football opposant l'Asec d'Abidjan à l'Ashante Kotoko de Kumasi au début des années 90. Cette fois, ils ont choisi, en plus de faire danser le corps, de remuer les consciences pour un véritable sursaut d'orgueil face aux dérives dont le pays a été victime. Dans la chanson, le peuple te regarde , ils exhortent le président à plus de responsabilité et de vigilance dans le choix de leurs collaborateurs. Quand y a trop de barrages, de rafles, de bavures policières, d'arrestations arbitraires, on dit que c'est président, alors fais attention aux gens que tu choisis chantent-ils. Yodé et Siro vont même plus loin. Tu seras comptable de ton choix. Si tu as choisi voleur, c'est nous on va t'appeler voleur . De même, ils fustigent l'enrichissement illicite avec une belle allégorie sur les châteaux, les immeubles et les stations qui poussent alors qu'il n'y a pas d'argent dans le pays et que le peuple souffre . Ce n'est pas tout, Yodé et Siro évoquent courageusement le scandale des déchets toxiques dont ils tiennent implicitement, comme il n'y a pas encore d'auteurs, le président pour responsable. On a souffert de la guerre. Sur la route de la paix, on vient nous empoisonner avec des déchets toxiques. Si on ne trouve pas de coupable, on dira président que c'est toi. Bien plus, ils invitent le président à jeter un coup d'?il du haut de son balcon (luxueux) sur ses administrés, dont certains ont juste besoin d'un peu de sparadrap pour panser leur blessures . Encore une allégorie pour rappeler au cher président que plus que des déclarations d'intention, le peuple a plutôt besoin de gestes concrets pour s'épanouir.

Qui clouent au pilori
les dirigeants actuels !
Yodé et Siro ne s'arrêtent pas là. Avec Quel est mon pays ? , ils dénoncent l'inconséquence d'une Côte d'Ivoire qui se perd dans un micro-nationalisme futile, à relents xénophobes, reniant ainsi les valeurs qui faisaient jadis sa fierté : la cohabitation pacifique et harmonieuse entre ses populations. Les deux chanteurs déplorent cette Côte d'Ivoire de frustrations où ton simple nom, ton faciès ou encore ton accoutrement déterminent ta nationalité , au mépris des dispositions de la loi fondamentale. Ils s'interrogent également, avec une voix empreinte de mélancolie, sur ce qu'est devenue cette Côte d'Ivoire d'intégration, vitrine, il y a quelques années, de l'Afrique, singulièrement de la sous-région. Pour autant, Yodé et Siro ne renoncent pas aux faits qui meublent la vie quotidienne : le mariage, la jalousie, la frime des binguistes sont ressassées avec une pointe d'humour.
De toute évidence, Signe Zo est un condensé de vérités que le public se plaît à écouter. On n'est donc pas surpris que depuis quelques jours, les maquis d'Abidjan soient sous le charme du produit de Yodé et Siro. Et la ville ne parle que de leurs textes. Cet album, pour sûr, nous réconcilie avec le zouglou. Le vrai. Celui qui dénonce, sans fioritures, les choses qui ne vont pas
Y. Sangaré

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