mercredi 26 décembre 2007 par Notre Voie

Vendredi 21 décembre 2007, campus de l'Université de Cocody, un jour comme les autres. Le temple du savoir grouille de monde. Tous les commerçants du secteur formel ou informel installés le long de la principale voie qui jouxte le bâtiment de la direction générale du Centre régional des ?uvres universitaires d'Abidjan (CROU-A) vaquent à leurs occupations.
Des véhicules sont stationnés à divers endroits du campus. Sur les différentes aires de jeu, des étudiants jouent, en cette matinée malgré la canicule, au basket-ball, football, au volleyball, au hand-ball...D'autres déambulent librement. Le restaurant universitaire, les différents maquis, restaurants, kiosques à café ne désemplissent pas. Les tenanciers de cabines cellulaires qui sont aux abords des deux grandes voies attendent tranquillement leurs clients.
Le décor est le même à la Cité Mermoz de Cocody, à la Cité de la Riviera 2 à Cocody, les résidences universitaires de Port-Bouët et de Yopougon, à l'université d'Abobo-Adjamé. Les espaces publics sont désormais des lieux de retrouvailles. Le bas-fond situé entre le campus de Cocody et le CHU de Cocody où la broussaille et les bidonvilles cohabitent n'est plus le théâtre de chasse à l'homme et de règlement de compte entre militants de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI). Les habitants de ce bidonville surnommé le camp Boiroa ont retrouvé la quiétude. Une situation de paix, de grande quiétude au moment où se tient au Forum du campus de Cocody, dans une atmosphère de convivialité, de fraternité, le sixième congrès ordinaire de la FESCI.


La normalisation de la vie estudiantine ou la fin des machettes

Une vie normale et apaisée sur les campus alors que se tient un congrès de la FESCI ? Cela était impensable il y a peu. L'annonce même d'un congrès de la FESCI suffisait pour que les campus, les résidences universitaires se vident totalement de leurs occupants. La vie s'arrêtait net. Parce que les congrès de la FESCI étaient le lieu par excellence d'affrontements armés et sanglants. Je me souviens de ce jeudi noir où les partisans de Soro Guillaume, armés de machettes s'en sont violemment pris aux partisans de Charles Blé Goudé. De tristes souvenirs. Il y a eu des morts sur le campus de Cocody. Des bagarres rangées lors des partages des mandats. A trois mois des congrès, des étudiants semaient la terreur pour intimider les partisans de tel ou tel candidat.
Si aujourd'hui chacun vaque normalement à ses occupations alors que le congrès se tient, c'est le signe que la FESCI a changé de visage. C'est le signe que la paix est une réalité", raconte K.S, un ancien militant de la FESCI, aujourd'hui dans la vie active.
La guerre des machettes née des conflits de leadership au moment de l'accession de Charles Blé Goudé à la tête de la FESCI, s'est poursuivie sous le mandat de Jean Yves Dibopieu. Avant l'avènement de Laurent Gbagbo au pouvoir, la Fesci a toujours été dans le collimateur des pouvoirs successifs d'Houphouet et de Bédié. Et la guerre des machettes avait été savamment orchestrée par l'ancien régime pour discréditer ce syndicat estudiantin pour le mettre en porte-à-faux avec celui de l'époque du parti unique.
S.Y., étudiante en maîtrise de droit, membre actif de la FESCI, croit rêver quand elle observe ce calme à un moment où se tient un congrès de la FESCI. Nous étions obligés de courir dans tous les sens. On ne savait pas qui cassait les portes. C'était aux environs de 3h. Je vois encore cet étudiant musclé, corpulent qui me poursuivait avec une machette. J'ai eu la vie sauve parce qu'il est tombé dans un caniveau. Blessé, il a abandonné la poursuite. Dans ma fuite, j'ai vu des étudiants découpés à la machette gisant dans une marre de sang, c'était affreux. Voir aujourd'hui tout le monde sur ce campus alors qu'un congrès de la FESCI se déroule, je dis que Dieu est merveilleux, raconte-t-elle presque les larmes aux yeux. M.A, militant de l'Union générale des étudiants et élèves de Côte d'Ivoire (UGEECI), rival de la FESCI croit dur comme fer au dégel des relations entre la FESCI et cette organisation qui, selon lui, ont toujours été tendues. Quand j'ai vu tous les responsables des organisations estudiantines et scolaires donner l'accolade à Serges Koffi (secrétaire général sortant de la FESCI) il y a quelques jours à l'université de Cocody, je me suis dit que quelque chose a changé, et que la décrispation est une réalité tangible", confesse-t-il.

Les vraies raisons du nouveau visage de la FESCI

En vérité, le nouveau visage de la FESCI ne surprend guère. Pour tous ceux qui ont vu évoluer la FESCI de 1990 à 2000, il n'y a rien d'étonnant. Depuis l'arrivée de Laurent Gbagbo au pouvoir en 2000, le droit d'exister et la liberté syndicale ont été érigés au rang des priorités par le nouveau régime. Comme pour toutes les autres organisations syndicales, Laurent Gbagbo n'a cessé de satisfaire les revendications syndicales. Chantre et apôtre de la liberté syndicale, Laurent Gbagbo a traduit en actes, toutes ses promesses. Les grandes exigences de la FESCI ont été prises en compte par le nouveau pouvoir. Au regard des bons rapports de confiance qui lient la FESCI au pouvoir, la FESCI s'est vu contrainte de réorienter sa lutte. Les dirigeants de la FESCI qui sont plus l'objet de poursuites intempestives, ont compris que plus rien ne justifie les violences sur les campus.
Le processus de normalisation de la vie estudiantine a commencé dès l'arrivée au pouvoir en 2000 du président Laurent Gbagbo. Jean Yves Dibopieu, puis Serge Kouyo ont ouvert la voie, Serge Koffi l'a poursuivi et l'a véritablement mis en forme.
La guerre des machettes, c'était l'?uvre de l'ancien pouvoir qui voulait, à tout prix, faire disparaître la FESCI. Pendant des années, Houphouet-Boigny et Bédé ont traité les dirigeants de la FESCI comme des opposants, des ennemis et non comme une organisation syndicale. La violence scolaire et estudiantine est alors comme la seule réponse d'une jeune organisation syndicale à la violence brutale que le régime d'alors faisait abattre sur elle. Avec Laurent Gbagbo, au contraire, la FESCI fonctionne normalement. Aucun de ses dirigeants n'est brimé. Aucun étudiant n'a été jeté en prison pour ses positions politiques. La répression systématique et le mépris ayant fait place au dialogue et à la considération, les dirigeants de la FESCI ont compris qu'il était mieux de faire évoluer dans un sens positif leurs méthodes de lutte.








Dossier réalisé par Charles Bédé

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