jeudi 11 octobre 2007 par Le Temps

Les langues ont commencé à se délier sur l`attentat manqué contre le Premier ministre Guillaume Soro. Elles révèlent les dernières conversations téléphoniques entre la cabine de pilotage et la tour de contrôle. Qui ce jour-là était aux mains de l`armée française.

29 juin 2007, il est 10 heures passées d`une poignées de minutes. Le ciel de Bouaké est déchiré avec fracas par des tirs de roquettes. Des feux nourris envahissent l`aéroport de la ville. Et l`avion présidentiel, le Foker 100, est pris pour cible. A son bord, le Premier ministre Guillaume Soro, des membres de son cabinet, des magistrats en déplacement pour l`installation du président du tribunal de Bouaké et des journalistes. Quatre morts sont identifiés mais le Premier ministre, cible principale, sort indemne du carnage. Comment cela a pu être possible ? Comment le pilote a-t-il man?uvré pour que Guillaume Soro ait la vie sauve sans la moindre égratignure et qu`il soit extrait de l`avion la veste couverte de sang et de chair de ses proches collaborateurs ? Pour élucider ces mystères, il faut s`en référer à la conversation entre la tour de contrôle et la cabine de pilotage. Et plus loin, pourquoi pas la boîte noire de l`avion ? Selon une source au sein du 43e BIMA (Bataillon d`infanterie marine), base militaire française), si Guillaume Soro a eu la vie sauve ce jour-là, c`est grâce à la maestria du pilote. N`eût été la maîtrise et l`expérience du Lieutenant-Colonel Lékpéli (qui est passé Colonel, il y a peu), le successeur de Konan Banny ne serait plus de ce monde. Grâce à cette source militaire proche de Licorne, nous avons eu accès à la substance de la conversation, entre la cabine de pilotage et la tour de contrôle.
C`est le BA-BA des cours de pilotage : Avant d`amorcer son atterrissage, le pilote demande toujours l`autorisation à la tour de contrôle. Cette tradition a été respectée par la cabine de pilotage du Foker 100, selon notre source. Qui poursuit que suite à la demande d`atterrissage, la réponse qui est venue de la tour de contrôle a été plutôt négative. La tour aurait proposé à la cabine de pilotage que l`avion fasse un " petit tour " dans les airs. Cette prescription a été respectée par la cabine de pilotage. Mais pourquoi donc l`atterrissage a été refusé au Foker 100 au moment où il en faisait la demande alors que le tarmac de l`aéroport était libre d`accès et qu`apparemment, aucun danger n`était perceptible, ni signalé ? Curieux tout de même ! Rappelons que la tour de contrôle et la tour au radar de l`aéroport de Bouaké étaient occupées ce jour-là par des éléments de l`armée française de l`Opération Licorne. Et c`est avec eux que conversait la cabine de pilotage de l`avion qui avait à son bord le Premier ministre ivoirien. Le drame aurait pu arriver avant même que le Foker 100 ne touche le sol de Bouaké. Ecoutons ce qui suit : " à un certain moment, on ne voyait plus l`avion sur le radar. La tour de contrôle ne l`avait plus sur son écran. Sans doute que l`avion est entré dans les flocons de nuages où il y est resté pendant un bon moment". Cette version nous a été rapportée par un soldat de l`armée française qui a requis l`anonymat. Pour savoir pourquoi l`avion n`était plus visible, nous avons tenté d`entrer en contact avec l`équipage du Foker 100. Mais en vain. A défaut de les avoir entendus, nous avons eu la version d`un proche. Ce dernier raconte que, ayant trouvé l`attitude de la tour de contrôle troublante et suspecte, le pilote (qui traîne des milliers d`heures de vol dans sa vieille carrière - le Foker 100 est presque comme son bébé depuis son achat au constructeur hollandais par le président Houphouët-Boigny-), aurait préféré, non pas de faire " un petit tour " comme le recommandait la tour de contrôle, mais de faire diversion. C`est ce qui s`explique par le flocon de nuage. Mais le camouflage sera de courte durée. Car, les minutes qui suivent, l`avion transportant le Premier ministre amorce déjà sa descente d`altitude et le tarmac n`est plus loin de lui. Cette descente subite aurait-elle précipité l`attaque ? Une chose reste sûre. C`est que, certainement pris de court, ceux qui en voulaient au Premier ministre et qui étaient postés dans "la direction de la tour" d`où sont venus les tirs de roquette, ont ouvert le feu. Quand nous avons cherché à savoir pourquoi la tour a demandé au pilote de faire "un petit tour", la réponse a été celle-ci : "certainement que dans le plan des assaillants, l`avion du Premier ministre devait être abattu loin de l`aéroport de Bouaké. Ils voulaient l`avion hors de l`aéroport de Bouaké. Ils ont été surpris de le voir descendre sitôt qu`ils l`avaient prévu. Ce qui pourrait expliquer le ratage de la cible. Les assaillants ont agi dans la précipitation, c`est ce qui fait qu`ils ont raté leur cible. Le sniper n`a eu aucun problème pour voir la position du Premier ministre dans l`avion et il n`y a que la précipitation qui puisse le faire rater sa cible". Cette source se veut formelle et va même plus loin. Elle nous mène à la boîte noire de l`avion. Selon notre informateur, tous les propos qu`il a tenus ne peuvent être vérifiés et authentifiés qu`à travers la boîte noire du Foker 100 présidentiel. Pour lui donc, pas besoin de polémiquer sur le sexe des anges. Les enquêteurs devraient interroger les boîtes noires et les voice-recorders de l`avion pour avoir une idée de la conversation téléphonique.

Bertina Soro

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